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Les Faits divers du "bon vieux temps" ! 

par Christian SCHMITTHEISLER

1854 L'empoisonneuse de Nothalten
exécutée en place publique à Barr

Ce matin a eu lieu à Barr l’exécution de la nommée Véronique Frantz, âgée de vingt-neuf ans, née à Meissengott, condamnée à mort par les dernières assises du Bas-Rhin pour crimes d’empoisonnements.
Un détachement d’infanterie a été dirigé sur Barr pour maintenir l’ordre.

 

Véronique Frantz avait été servante chez le sieur George Guntz, cultivateur à Nothalten, commune du canton de Barr. Véronique, qui avait acquis un certain ascendant sur l’esprit de son maître, conçut le projet de devenir son épouse et de remplacer dans la maison la femme Guntz, qu’elle résolut dès lors de faire périr par le poison; mais avant tout elle dut assassiner la belle-mère de Guntz, la femme Ruhlmann, qui avait demandé et obtenu tout à coup son renvoi de la maison. La femme Ruhlmann, septuagénaire, mourut empoisonnée le 1er décembre 1852.


Puis la femme Guntz succomba de la même manière, le 6 juillet 1853, à l’age de 45 ans.
Enfin, Véronique crut avoir touché le but de ses désirs et de ses crimes et de devenir la femme de son maître, lorsque tout à coup Guntz, après un veuvage de six mois, se prépara à convoler en secondes noces avec une fille appartenant à une honnête famille du village. Véronique désappointée, furieuse, se décida à creuser une troisième tombe à côté de celles qu’elle avait déjà ouvertes, et le jour même des fiançailles de Guntz, elle lui versa de l’arsenic dans ses aliments.

 

Guntz mourut empoisonné le 27 janvier 1854, à l’age de 44 ans. Dès lors, la rumeur publique s’émut de ces morts successives et précipitées, la justice instruisit, et Véronique Frantz, arrêtée et jugée, fut condamnée à mort le 17 juin dernier.

Aujourd’hui 7 août 1854, à une heure du matin, Véronique Frantz fut réveillée par l’arrivée de M. le directeur des prisons, de M. l’abbé Guerber, aumônier, et du greffier de la Cour d’Assises.
Ce dernier venait lui annoncer que son pourvoi en cassation avait été rejeté et que sa demande de grâce avait été également repoussée. Elle reçut cette fatale nouvelle avec calme et résignation; Quelques soupirs trahissaient seuls l’anxiété et les angoisses qui déchiraient son âme.


Elle se rendit dans la chapelle de la prison avec M. l’abbé Guerber, qui, depuis le jour de la condamnation, n’a cessé de lui prodiguer journellement les secours de la religion. Après la messe, à laquelle elle a assisté avec recueillement, la condamnée a pris une tasse de café au lait et un petit pain qu’elle mangea avec appétit, puis elle pris place dans la voiture qui devait la transporter à Barr. Elle était accompagnée de M. l’abbé Guerber, de l’adjudant de gendarmerie du Bas-Rhin et de deux gendarmes. La voiture était escortée par quatre gendarmes à cheval.

Durant ce long trajet, entre Strasbourg et Barr, la patiente conserva son calme; elle récitait des prières et écoutait avec attention les pieuses exhortations que le digne prêtre lui adressait. Sa pensée se portait très souvent sur ses père et mère, qu’elle n’avait pas revus depuis sa condamnation, et dont elle regrettait amèrement de couvrir le nom de honte et d’ignominie.


A cinq heures et demie, le funèbre cortège arriva à Barr. La condamnée fut déposée dans la prison de cette ville. C’est là que les exécuteurs procédèrent aux apprêts de la toilette et lui lièrent les mains sur le dos. Elle fut ensuite conduite en voiture sur la grande place, où, dans la nuit, l’échafaud avait été dressé en face de la maison commune. Une foule immense se pressait sur cette place et dans les rues que le cortège devait traverser, car depuis soixante-deux ans, aucune exécution capitale n’a eu lieu à Barr.


Arrivée au pied de l’échafaud, la patiente en gravit des degrés, soutenue par l’un des exécuteurs, puis elle s’agenouilla à côté de M. l’abbé Guerber pour dire une dernière prière.


Après avoir à plusieurs reprises embrassé le crucifix que le ministre de Dieu lui présentait, les exécuteurs s’emparèrent d’elle, et une minute après elle avait cessé de vivre.

 

Source : L’Echo Français 07/08/1854

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La place de la mairie telle qu'elle se présentait en 1854

Vue partielle de E. THEROND, ill. et POUGET, ill.

(Source BNU)

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La prison de Barr de la rue de la Kirneck,

dernière étape de la condamnée avant l'échafaud

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L'échafaud fut dressé sur la place de la mairie l

1946 Le double meurtre des époux Meyer

Le triple assassin OHNIMUS, d’Obernai a été arrêté dans un hôtel de Mulhouse. Il avait sauvagement assassiné M. Meyer de Barr, dans la nuit de samedi à dimanche dernier.

Frédéric Ohnimus, âgé de 19 ans, d’Obernai (*), coupable d’un triple assassinat, l’un à Marseille, les deux autres à Barr, a été arrêté dimanche matin alors qu’il était descendu dans un hôtel de Mulhouse. C’est sur l’initiative du commissaire Schmitt que la police mulhousienne s’est saisie du criminel, surpris par l’arrivée des inspecteurs. Avant qu’il ait pu se servir de son colt, Ohnimus fut ceinturé et rendu inoffensif. Interrogé à la P.J. de Mulhouse, Ohnimus se «mit immédiatement à table», avouant son crime de Marseille et reconnaissant être l’auteur de l’assassinat de M. Meyer, de Barr. Ohnimus a été transféré de Mulhouse à Strasbourg et écroué rue du Fil.

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Le crime de Marseille

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Le 27 novembre dernier, la police de Marseille avait découvert le cadavre de Mme Jeanne Daigre, âgée de 71 ans, étranglée à l’aide de chiffons. Le vol semblait avoir été le mobile du crime, mais seule une somme de 10.000 fr. avait disparu. Un foulard blanc resté sur place permit à la Sûreté d’identifier un nommé «Jeannot», un ami de la maison, et dont le signalement fut immédiatement transmis aux différents services de police.

L’assassinat de Barr

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Venu à Strasbourg après son crime de Marseille, Ohnimus, car c’était lui l’assassin de Mme Daigre, commit plusieurs vols dans la nuit de samedi à dimanche, dans les environs de Barr. Toute la vallée de Barr fut mise en émoi lorsque des passants eurent découvert, non loin du «Jardin du Cloître», les corps de M. Louis Meyer, 77 ans, ouvrier, et de sa femme, née Anne Trapp, 68 ans, baignant tous deux dans une mare de sang. Ils avaient été sauvagement frappés avec un objet contondant, plus exactement un marteau. Lorsque la gendarmerie, alertée, arriva sur les lieux du crime. M. Meyer avait déjà succombé à ses blessures. Son épouse fut immédiatement transportée à l’hôpital civil de Barr, où son état est toujours jugé très grave, mais non désespéré (**). Dans sa première enquête, la police mobile de Strasbourg appréhenda le fils des époux Meyer, M. Edmond Meyer, 40 ans, qui fut toutefois relâché, ayant pu prouver son entière innocence.

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La maison des époux Meyer

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CONCLUSION

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Ce dernier crime n’avait rapporté à Ohnimus que 40.000 fr. Déjà après le crime de Marseille, Ohnimus était venu s’échouer dans un petit hôtel du centre de Strasbourg où il s’inscrit sous le nom de Frédéric Ohnimus, peintre, né le 1er août 1927, à Obernai. Là, dans la nuit du 30 novembre, il avait emmené dans sa chambre une petite «amie» de passage qui, pour n’avoir pas eu d’argent sur elle, se fit à nouveau mettre à la porte. Elle l’a peut-être échappé belle. Son arrestation à Mulhouse a pu se faire si rapidement grâce aux renseignements provenant de Marseille.


Beau coup de filet enregistré là par le commissaire Schmitt.

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(*) En vérité Fritz Ohnimus est un Allemand, né dans le Palatinat, déserteur de la Wehrmacht et qui se fait passer pour un Alsacien.
(**) Mme Meyer a succombé à ses blessures le 1er janvier 1947.

 

Journal d’Alsace du 12/12/1946

L'entrée de la prison de la rue du fil à Strasbourg

DEVANT LA COUR D’ASSISSES DU HAUT-RHIN
OHNIMUS, assassin des époux Meyer, de Barr, a été condamné, hier, à la peine de mort.
Il aura encore à répondre à Marseille d’un troisième meurtre.

Double crime crapuleux dans toute sa sauvagerie que celui dont la Cour d’Assises eut à s’occuper hier. Il s’agit de la répugnante affaire Ohnimus Frédéric, âgé de 20 ans, peintre, sans domicile fixe, accusé d’assassinat commis avec préméditation et de vol qualifié concomitant.
Rappelons les faits que nous avions rapportés en leurs temps et qui firent grand bruit dans la région.
Courant novembre 1944, le ressortissant allemand Ohnimus Frédéric, actuellement âgé de 20 ans, fut interné dans un camp de prisonniers civils et militaires à Marseille, dont il fut libéré bientôt en se faisant passer pour un Alsacien. Il demeura dans la dite ville, vécu d’expédients et fit de longs séjours en prison.


Le 25 novembre 1946, il étrangla une vieille femme pour lui dérober ses économies s’élevant à 6.000 francs, crime dont il répondra devant la Cour d’Assises des Bouches du Rhône.
Il quitta aussitôt ce département et se rendit à Strasbourg où il dilapida rapidement son butin ainsi que celui de quatre cambriolages qu’il avait commis quelques jours après son arrivée et se retrouvait à nouveau sans argent.

Pour se procurer des ressources plus importantes, il se rendit à Barr en emportant une valise contenant quelques effets, une puissante torche électrique et un pistolet automatique de 6 mm 35 chargé, car déjà il était prêt à supprimer quiconque se mettrait en travers de son projet de cambriolage.


Arrivé à Barr après 19h, il dépose sa valise à la gare et, après avoir erré quelques temps dans le centre ville, se dirigea vers les quartiers extérieurs à la recherche d’une maison isolée. Il avisa ainsi celle attenant à une scierie et en fit le tour pour chercher à y pénétrer. Toutes les portes étant fermées, il s’empara d’un marteau posé sur le rebord d’une fenêtre lorsque l’arrivée d’un homme accompagné d’un enfant le contraignit à se dissimuler derrière un amoncellement de grumes. Inquiété par l’homme et la lumière d’une baraque voisine, Ohnimus se retira non sans emporter le marteau qui lui parut utile à la fois pour l’effraction et comme arme éventuelle plus silencieuse que son pistolet.


Rebroussant chemin, il s’approcha d’une petite maison isolée, sans étage, dont les volets étaient ouverts et les fenêtres non éclairées. Il surveilla l’immeuble durant quelques instants et ne perçut aucun bruit, car les habitants, deux vieillards, les époux Meyer, âgés de plus de 70 ans étaient couchés, et leur fils passait la soirée dans une auberge.

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Rassuré par cet examen, Ohnimus gravit l’escalier d’entrée et pénétra dans la maison sans difficulté. S’éclairant à l’aide de sa torche électrique il visita d’abord la cuisine, puis entra dans une chambre dans laquelle il découvrit les époux Meyer couchés dans un lit. Mais surpris d’entendre la dame Meyer qui croyait s’adresser à son fils, l’inviter à entrer, il se retira dans un hangar.
Décidé à exécuter à tout prix son projet criminel, il entra dans la maison, et entreprit dans la cuisine la fouille des meubles non sans avoir pris le soin auparavant de mettre des gants de cuir pour ne pas laisser d’empreintes. Par ailleurs, alerté par le bruit insolite, le sieur Meyer se leva pour fermer la grille de son jardin, verrouiller la porte d’entrée et inspecter la maison.

 

Lorsqu’il pénétra dans la cuisine, Ohnimus embusqué derrière la porte, lui asséna un violent coup de marteau sur la tête. Le vieillard s’écroula sans pousser de cri. 
Sans tarder, Ohnimus ferma les volets et alluma l’électricité pour recommencer ses investigations. Dérangé à nouveau, par la dame Meyer, qu’il entendit ouvrir la porte de la chambre il se précipita vers elle et lui porta également à la tête un coup de marteau extrêmement violent. La victime s’affaissa sans proférer une plainte.

 

Ohnimus se mit alors à la recherche d’argent. Il fouilla une première armoire et en jeta le contenu à terre. Entre temps la dame Meyer réussit à se mettre en position assise, mais hébétée, elle suivit le cambrioleur du regard et ne put pousser un cri. Son mari lui aussi fit des efforts pour se relever. S’en étant aperçu, Ohnimus l’acheva et s’acharna à lui porter plusieurs coups de marteau sur la tête. Pour étouffer les râles du vieillard, il lui enfonça un chiffon dans la bouche.
Ayant ainsi réduit à l’impuissance les deux vieillards, l’assassin essuya son marteau ruisselant de sang et fractura à l’aide de cet instrument la porte d’une seconde armoire. Il y trouva une liasse de billets de banque et trois coupures allemandes qu’il emporta ainsi que les cartes d’alimentation des époux Meyer. Puis il quitta les lieux sans plus s’occuper de ses malheureuses victimes qui vivaient encore l’une et l’autre.

Chemin faisant, il se débarrassa du marteau et constata que son butin s’élevait à 47.000 frs et 5 marks. Il passa la nuit à la gare, changea de pantalon et partit le lendemain matin pour Strasbourg, puis pour Mulhouse.
 

1 heure environ après son crime, le fils des victimes revint à son domicile et y découvrit le cadavre de son père baignant dans le sang, et sa mère, ensanglantée et horriblement blessée, debout au pied de son lit. Elle devait décéder le 1er janvier 1947 des suites de ses blessures selon les constatations du médecin-légiste après une longue et atroce agonie.
 

Le lendemain du crime, l’assassin était arrêté dans un hôtel de Mulhouse et fut encore trouvé porteur de son butin et d’un pistolet automatique chargé et prêt à tirer. Il reconnut le crime et a maintenu ses aveux aux cours de l’information judiciaire.
Ohnimus a un long passé judiciaire. Plusieurs fois condamné pour vols, dont certains à main armée, à Saverne, à Draguignan, à Marseille et en dernier lieu à Colmar, il aura encore à répondre devant la Cour D’Assises des Bouches-du-Rhône d’un crime d’assassinat et de vols (***) .

 

Examiné au point de vue mental, ce dangereux malfaiteur a été reconnu pleinement responsable de ses actes.
En conséquence, Ohnimus Frédéric est accusé d’avoir, à Barr, le 7 décembre 1946 en tous cas depuis un temps non prescrit :
1)    frauduleusement soustrait une somme de 47.000 francs en numéraires, une somme de 5 marks en numéraires, une alliance et deux cartes d’alimentation, au préjudice des époux Meyer, qui en étaient les légitimes propriétaires, avec ces circonstances que ladite soustraction frauduleuse a été commise la nuit, dans une maison habitée, avec effraction intérieure et que le coupable était porteur d’une arme apparente ou cachée
2)    volontairement donné la mort au sieur Louis Meyer et à la dame Trapp épouse Meyer et ce avec préméditation, avec cette circonstance que les assassinats ont été précédés du crime de vol ci dessus spécifié sous N°1.

 

Après les débats au cours desquels OHNIMUS garda un cynisme sans pareil, M. Kennel, avocat général, fustigea en termes cinglants l’ignoble individu pour lequel il demanda la peine capitale. Me Macker, défenseur, ne réussit pas à sauver la tête de son client qui finalement entendit sans broncher qu’il était CONDAMNE A MORT.

​

(***) Fritz Ohnimus a été condamné à la peine capitale seconde fois par la Cour d’Assises d’Aix-en-Provence le 9 février 1949 pour le meurtre de Mme Daigre à Marseille le 18 novembre 1946.

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Journal d’Alsace du 23/01/1948
 

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FRITZ OHNIMUS
Trois fois assassin a été guillotiné ce matin dans la prison de Colmar

Une tête est tombée ce matin à la prison de Colmar peu avant quatre heures, celle de Fritz Ohnimus, le jeune Allemand qui a 19 ans et en l’espace de quelques semaines perpétra un triple forfait : l’assassinat d’une rentière à Marseille et celui d’un vieux couple à Barr, les époux Meyer, forfaits pour lesquels le jeune dévoyé fut condamné à mort d’abord par les Assises du Haut-Rhin le 23 janvier 1948, puis quelques mois plus tard par les jurés populaires des Bouches-du-Rhône.


Depuis quelques jours, Ohnimus ne pouvait plus se faire d’illusions sur son sort. Après avoir présenté un recours en grâce, ses avocats – dont Me Macker qui le défendit devant les Assises du Haut-Rhin – avaient été convoqués chez le Président de la République le 19 juin dernier. Le recours fut rejeté.

​

Et dans l’après-midi de mercredi une camionnette grise que rien ne distinguait d’une autre pénétrait discrètement dans la cour intérieure de la Maison d’Arrêt de Colmar. Elle transportait avec les bois de justice, l’exécuteur des hautes œuvres, venu en droite ligne de Bordeaux où l’avait appelé ses sinistres fonctions.

Commencés dans la journée les préparatifs se poursuivent tard dans la nuit. Ce matin peu avant quatre heures, justice devait être faite dans la cour de la prison où l’échafaud avait été dressé à l’abri des regards des indiscrets, les exécutions capitales n’étant plus publiques.

 

Journal d’Alsace du 08/07/1949

1948 - Dramatique accident

En marge du tricentenaire à Barr, sous les yeux terrifiés de la foules
UN JEUNE HOMME DE 15 ANS FAIT UNE CHUTE DE 5 METRES
Lors d’une démonstration de sauvetage au Congrès Départemental des Sapeurs-Pompiers

Dès samedi, la pittoresque ville de Barr s’était préparée à recevoir ses hôtes venant de tous les coins du département. Sous le signe du tricentenaire, une grande fête des sapeurs-pompiers devait se dérouler.. Partout on voyait flotter des drapeaux tricolores. Les maisons étaient richement ornées de guirlandes et à toutes les entres de la ville, des arcs de triomphe souhaitant la bienvenue aux invités avaient été érigés.


Dimanche matin de très bonne heure, le «réveil» fut sonné par les sapeurs. Les trains et les autocars qui amenaient les participants de cette grande fête étaient bondés. On vit notamment arriver les délégations des corps et des sapeurs-pompiers de Strasbourg, Haguenau, Sélestat, Molsheim, Villé, Epfig, Sundhouse, Muttersholtz, Boofzheim, Andlau, Zellwiller, Blienschwiller, Eichhoffen, Stotzheim, Nothalten, Heiligenstein, Mittelbergheim, Saint-Pierre-Bois, Maisonsgoutte.
Un soleil radieux jetait des rayons ardents sur la foule qui se promenait dès le matin dans les rues de la ville, et promettait d’avance un grand succès à cette fête populaire.

Malheureusement, un grave accident survint vers 9 heures du matin, au cours d’une démonstration de sauvetage en cas d’incendie, faite par les sapeurs-pompiers de Barr.
Un sac de sauvetage avait été fixé au 3e étage de l’immeuble de M. Charles Rauch, situé drue des Maréchaux. Ce sac avait déjà été utilisé depuis des années, sans que le moindre accident ne se soit jamais produit. Après avoir fait une première glissade, le fils du pharmacien, M. Stahl âgé de 15 ans, se laissa également rouler dans l’ouverture de cette installation de sauvetage.


A ce moment, les pompiers s’aperçurent que les boutons du sac n’étaient plus tous fermés. Voyant le danger qu’encourait le jeune garçon ils essayèrent de le lui faire comprendre, mais l’avertissement vint trop tard.


Glissant par l’ouverture, le jeune Michel Stahl tomba d’une hauteur d’environ 5 mètres sur le pavé où il restait inerte. Gravement blessé, il fut aussitôt transporté à l’hôpital civil de Strasbourg où les médecins ont constaté une fracture du crâne et diverses blessures internes. En plus de cela, le destin a voulu que les parents du malheureux enfant se trouvent justement en voyage en Suisse où ils avaient l’intention de passer leurs vacances, et n’ont pas pu jusqu’à l’heure actuelle être mis au courant de ce grave accident.

Sous la présidence de M. le commandant Roussin (Strasbourg), le premier Congrès Départemental s’est ensuite tenu dans la grande salle de l’Hôtel du Parc. Le Commandant a tenu une allocution très intéressante au de laquelle il a également effleuré le tragique accident.

 

L’utilisation du sac de sauvetage a été interdite.
Après avoir déposé une magnifique gerbe au Monument aux Morts, les officiers et sapeurs-pompiers se rassemblèrent pace de la Mairie, où, à 11 heures précises furent réunis M. Paira, Préfet du Bas-Rhin, M. Graff, Sous-préfet de Saverne. Le Préfet était accompagné « incognito » de MM. Cornut-Gentille, Haut-Commissaire de France en A.E.F., et Bourges, ancien Préfet d’Erstein. Ce fut pour la population une agréable surprise !


Un vin d’honneur fut ensuite offert à tous les invités. M. le Maire Paul Degermann fit un discours sur le tricentenaire sur la Résistance et l’héroïsme des patriotes qui, en 1944, ont libéré pour la deuxième fois la France du joug allemand.

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La journée commence joyeusement avec "le réveil" par la clique des sapeurs-pompiers de Barr

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Les pompiers ont mis en place la chaussette de sauvetage en escaladant la façade à l'aide d'une échelle à crochets. L'accident fatal va se produire dans les instants suivants.

En présence de MM. Grass, sous-préfet de Saverne, Paul Degermann, maire de Barr, et de nombreuses personnalités locales, M. René Paira, préfet du Bas-Rhin, embrasse paternellement la petite Alsacienne (photos A. Heller)

M. le Préfet manifesta dans son allocution sa joie d’être parmi ses anciens amis de l’arrondissement de Sélestat. Il rendit hommage aux sapeurs-pompiers, toujours prêts à défendre les biens de leurs concitoyens.
Evoquant le patriotisme des Alsaciens, M. Paira demande : « Comment se fait-il que depuis des centaines d’années, l’Alsace a toujours été profondément hostile à tout ce qui est venu de l’autre côté du Rhin ? C’est parce que nous aimons les principes des la liberté. » Parlant du plan de redressement, il adressa un pressant appel à la bonne volonté de tous les concitoyens de faire leur devoir pour le salut de la France.
Après cette courte visite, M. le Préfet se vit obligé de partir, ayant encore eu d’autres obligations.


Un banquet présidé par M. le Sous-Préfet Graff réunit M. le Conseiller Général Naegel, M. le Maire Degermann et ses adjoints, M. le Dr Adloff, MM. Bohn et Burgard, le Conseil Municipal, ainsi que MM les officiers des sapeurs-pompiers. M. Hering, capitaine des sapeurs-pompiers de Barr ouvrit la série des discours qui furent tenus au cours du banquet.
Vers 15 heures, un grand défilé traversa les principales artères de la ville. Au terrain de sport une grande foule applaudit les belles manifestations sportives exécutées par les sapeurs-pompiers de la ville de Strasbourg.
Place de la Vieille Gare, un grand bal et des attractions diverses avaient été organisées. Et c’est très tard dans la nuit qu’on se sépara avec la conviction d’avoir passé une très belle journée.

(Journal d’Alsace et de Lorraine du 27 juillet 1948)

LE JEUNE MICHEL STAHL DE BARR EST DECEDE HIER MATIN

A LA SUITE DES BLESSURES CONTRACTEES LORS DE SA CHUTE

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Le jeune Michel Stahl, âgé de 15 ans, dont nous vous avons relaté hier l’accident survenu lors d’une démonstration de sauvetage des sapeurs-pompiers à Barr, est décédé hier matin à l’Hôpital de Strasbourg où il avait été transporté dimanche.
Ses parents, actuellement en vacances en Suisse, sont toujours dans l’ignorance du terrible malheur qui vient de les frapper, et ceci malgré les appels lancés par Radio Strasbourg et les émetteurs suisses.

(Journal d’Alsace et de Lorraine du 28 juillet 1948)

1959 - Meurtre au Moenkalb

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Au milieu de la claire et chaude nuit d'Alsace, les cris de Mme Dietz déchirèrent tout à coup le silence de l'asile. Déjà la course des infirmiers soulevait des échos précipités au long des corridors déserts. La vieille femme continuait de lancer dans l'ombre du dortoir ses appels éperdus. 
«Georges ! Mon fils ! Il est en danger ! Laissez-moi partir ! Il faut que je le voie !»
Maintenant, tout l'asile de vieillards de Barr s'était éveillé, et les pensionnaires, pénétrés d'un sentiment étrange, n'avaient même pas besoin d'ouvrir leurs paupières lasses pour voir cette paysanne de 86 ans dont l'angoisse inexplicable venait les bouleverser, au fond de leur solitude morose. 

«Georges, Georges, mon enfant... Laissez-moi le rejoindre...»

Elle arracha ses draps, se mit à courir comme une folle; une heure s'écoula avant qu'elle ne s'endorme, d'un sommeil agité de sursauts convulsifs. 
Georges Dietz, le doyen des gardes-forestiers du district de Barr, venait d'être tué, à vingt minutes de là, dans sa maison de «Moenkalb», cachée sur une pente des Vosges au milieu des sapins et des châtaigniers. Personne ne le saurait avant de longues journées. Vers quatre heures du matin, à l'instant même où un avertissement mystérieux touchait Mme Dietz dans l'asile de Barr, les étoiles seules avaient vu une ombre furtive traverser la cour de la maison forestière «Moenkalb» " et gagner la petite porte derrière laquelle dormait son fils... Le vent soufflait doucement dans la forêt de sapins, qui se découpait sur le ciel irradié d'une sourde lueur. Le chien à poils roux, museau à terre, s'approchait lentement et vint flairer l'arrivant. Georges Dietz reposait paisiblement, ignorant que la mort n'était plus qu'à quelques pas de lui.
Le destin allait s'accomplir...
Le doyen de la forêt mourrait dans ce royaume du silence où sa vie entière s'était écoulée. Jamais il n'avait pu croire qu'il devrait un jour le quitter et sa récente mise à la retraite l'avait laissé incrédule et désespéré. 
A travers toute la région, jusqu'au Landsberg et au mont Sainte-Odile, l'ermite des bois était depuis bien longtemps une silhouette des plus familière. 

La mère de Georges Dietz et son fils. La malheureuse vieille femme, dans le dortoir de l'asile de vieillards, s'éveilla soudain : «Georges est en danger, criait - elle, laissez-moi le rejoindre ! ...»
Enfin elle se calma. Mais elle ne s'était pas trompée : tout près de là son fils chéri venait d'être tué...

Un étrange pressentiment avait réveillé la vieille Mme Dietz au milieu de la nuit…

Tu peux t'en aller ! 

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C'était un célibataire endurci, il s'était voué, corps et âme et il régnait en maître absolu. Quand Georges Dietz se fâche, disait-on, on peut l'entendre à dix lieues à la ronde ! Mais cela n'empêchait pas le vieil ours, qui avait horreur des femmes, d'aimer les plaisanteries faciles, et l'on savait aussi qu'il avait un cœur d'or. Il lui arrivait même, parfois, d'employer bien mal sa tendresse, et c'est ainsi qu'il eut le plus grand tort d'attacher à lui un simple d'esprit le nommé Jean Schmitt. 
Ce dernier n'était pas bon à grand chose... Né le 12 février 1934 à Paris, il avait été élevé par sa grand-mère à Barr. Son comportement avait toujours été anormal, et il avait eu quelques démêlés avec la justice. 
Entre les deux hommes, si dissemblables, s'était établie une singulière amitié, une sorte de pacte qui autorisait le jeune homme à faire un peu ce qu'il voulait dans la maison forestière... Quand le vieux maître s'absentait, ce qui lui arrivait souvent, Jean Schmitt se conduisait à sa guise. Certes, il n'était que valet de ferme, uniquement chargé de s'occuper des deux vaches, et d'entretenir le petit jardin, entouré d'une haie de buis, et qui domine un paysage magnifique sur Barr et la plaine d'Alsace. Mais il avait réussi à gagner la confiance de Georges Dietz et lui servait de chauffeur. Parfois on voyait le domestique conduisant son patron dans sa 4 CV; la plupart du temps, Schmitt demeurait réfugié dans la maison des hauteurs. 

L'harmonie aurait pu durer éternellement, lorsque Georges Dietz reçut l'avis de sa mise à la retraite. Cependant, le vieux garde se refusa à croire qu'on allait vraiment le remplacer. Le district forestier n’appartenait à personne qu’à lui, «Moenkalb» était sa maison ! Quand les maçons arrivèrent pour remettre le corps du logis à neuf, il cria sa colère. Une semaine plus tard il dit à Schmitt :
- Maintenant, je n’ai plus besoin de toi, tu peux t’en aller, quitter la maison…
Le valet fit là sourde oreille. 
Alors, Georges Dietz s'emporta. 
- Fainéant ! Voleur ! Bon à rien !
Maints qualificatifs, impossibles à reproduire, s'échappèrent de sa bouche. Enfin, le vieux, fatigué de crier, s'empara d'un bâton de craie et couvrit les volets de la maison d'épithètes peu flatteuses à l'adresse de Jean Schmitt. Celui-ci n'avait plus qu'à décamper... 
... Il était revenu, les lèvres tordues par un rictus sauvage, animé par le désir de se venger, et aussi par la cupidité. Le chien le connaissait, Dietz était sans méfiance... Pourtant, depuis quelques jours, le garde-forestier avait peur de son ancien valet, et il avait confié ses craintes à quelques amis : il avait cependant négligé de prendre des précautions : la clé se trouvait toujours derrière les volets, et Jean Schmitt n'eut qu'à la prendre, après un rapide regard autour de lui. La maison lui était familière, une calme respiration le guida vers la chambre. Là se trouvaient les 35.000 francs que le vieux avait touchés dernièrement. 
Ce qui se passa ensuite ne sera peut-être jamais complètement élucidé; il est possible que Schmitt n'ait pas eu l'intention de tuer Georges Dietz; le garde-forestier, soudain réveillé, l'a-t-il pris sur le fait ? Une lutte se serait engagée... 
Quoi qu'il en soit, l'ex-domestique frappa le vieillard au visage, de toutes ses forces. Saisi d'une folie meurtrière, il s'acharna sur lui, l'assomma, et le traîna par les bras dans la cour. La victime remuait encore : Schmitt cogna sa tête contre les dalles pour l'achever. 
Ce n'est pas la peur qui envahit le meurtrier à ce moment, mais un mélange de trouble satisfaction et d'inquiétude. Une idée absurde s'était dessinée dans son esprit incohérent : dissimuler le corps, et s'installer à «Moenkalb», comme autrefois.
Il parvint à tirer le cadavre jusqu'à un taillis proche, et le couvrit d'un drap et d'un édredon. Le gros chien à poils roux n'avait pas aboyé... 

Le lendemain on vit Jean Schmitt payer avec des billets de mille francs dans les restaurants de Barr, et cela surprit un peu, mais nul ne songea à un crime. L'absence du vieux Dietz ne surprit pas tout de suite, car il disparaissait assez fréquemment sans prévenir qui que ce soit. L'ancien valet passait ses journées à boire, et le soir, Il revenait passer la nuit dans la maison forestière. 
Le décor n'avait pas changé, les affaires du garde-forestier étaient toujours là, et cela ne troublait aucunement son meurtrier. Toutefois, il ne manquait pas d'aller faire un tour du côté du taillis... Quand il voyait les jambes de sa victime dépasser l'édredon, il se sentait rassuré, et se couchait tranquillement. Personne n'était venu... 

C'est sûrement lui !

 

Malheureusement, un fâcheux survint... Par un beau matin, un petit homme malingre, cheveux blonds, les yeux étrangement bleus, monta vers la maison forestière pour rendre visite à son ancien patron Georges Dietz... L'homme s'appelait Helmut Sandweg. Ancien prisonnier de guerre allemand, Sandweg avait tout perdu pendant la guerre et s'était installé en Alsace pour gagner sa vie, travaillant comme aide de cuisine, coupant du bois en hiver.
Trois ans auparavant, l'ex­-prisonnier avait fait la connaissance de Dietz, qui lui proposa de travailler à «Moenkalb». Sandweg y resta huit mois. Il n'avait pas grand chose à faire, mais les 8000 francs qu'il gagnait par mois constituaient un attrait insuffisant : il partit, Schmitt vint le remplacer. Quand ce dernier, récemment, s'était fâché avec Dietz le garde-forestier renouvela ses offres à Sandweg. 
Celui-ci venait de pousser la petite porte qui clôture la ferme et caressait le chien. La maison était déserte : 
- Dietz sera toujours le même ! Il est parti dans la forêt sans fermer la porte du logis. 
Le surlendemain, vers 19 h, il revint à «Moenkalb» et trouva quelques membres de la famille, qui paraissaient inquiets : Le garde-forestier restait introuvable. La maison avait été fouillée de fond en comble; Sandweg passa la nuit dans la grange; le lendemain matin, deux gendarmes de la brigade de Barr décidèrent d'effectuer des battues. 
Ils n'en eurent pas besoin. Dans l'après-midi, Sandweg vint se présenter à la brigade, et conta une étrange histoire :
- Je commençais à me demander moi aussi s'il n'était pas arrivé quelque chose à mon ancien patron. J'ai pensé qu'il pouvait être mort dans la forêt. Prenant mon bâton de noisetier, j'ai fait le tour de la maison, accompagné du chien. Tout à coup, à un mètre devant moi, j'ai vu une forme blanche enfouie sous un taillis. Deux pieds dépassaient d'un édredon. «C'est sûrement ce chenapan de Schmitt qui a fait le coup», ai-je pensé. Sans rien toucher, je suis redescendu à Barr, où était aussi Schmitt.
Quelques instants plus tard, les gendarmes conduisirent Jean Schmitt vers le fourré : il avoua aussitôt. Des 35000 fr. qu'il avait volés, il ne lui restait plus que 2000 fr. Menottes aux poings, encadré par les gendarmes de Barr sous le commandement de l'adjudant Musso et ceux de Sélestat sous les ordres du capitaine Souet, Schmitt arborait un sourire imbécile. 
Quelques jours plus tard, intrigués par l’étrange conduite de Sandweg, les enquêteurs interrogèrent celui-ci. Il finit par avouer qu'il avait profité de l'occasion pour faire main-basse sur une partie du magot. Il avait deviné l'assassinat du vieillard et exigé de l'assassin le prix de son silence. Puis, prenant peur soudain, l'avait trahi et livré à la police. 
Quand le meurtrier s'en alla vers son destin, une étrange solitude s'installa dans la maison forestière. Les deux vaches, indifférentes, paissaient dans le pré voisin. Alors le gros chien à poils roux regarda de ses yeux mornes la foule qui allait et venait, puis se coucha tristement dans un coin de la cour. «Moenkalb» avait perdu son maître, le vieil ermite qui ne voulait pas quitter ses bois. 
Il est mort dans le silence de la nuit, et nul n'avait deviné le crime, sauf la vieille mère à qui l'on n'a pas osé dire, dans sa retraite, que son instinct ne l'avait pas trompée... 

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Helmut Sandweg : il fit payer à l’assassin le prix de son silence.

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Jean Schmitt : il avait réussi à capter la confiance du bon Georges Dietz. C’était un simple d'esprit et un cupide. Quand il fut contraint de décamper, il n'eut plus qu'une pensée: s'emparer de l’argent qu'avait touché son maître. Et il n’hésita pas à frapper le vieillard de toutes ses forces. Plus tard il alla cacher le cadavre dans un taillis croyant, en sa grande naïveté, qu’il ne serait pas inquiété.

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Georges Dietz : jamais il n’avait pu croire qu’il devrait un jour quitter sa forêt. Sa mise à la retraite l'avait désespéré. 

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La maison forestière «Moenkalb», dans les sapins et les châtaigniers.

Source : le Détective 1959

Le même fait divers vu par le Journal de Barr

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Le meurtre mystérieux au Mœnkalb

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Quelle ne fut pas la consternation de toute la population de Barr et de Heiligenstein lorsqu'elle apprit la terrible nouvelle de l'assassinat du garde forestier Georges DIETZ jeudi dernier. D'une manière générale, on craignait déjà pour les jours du forestier, si connu dans notre région, et ce au vu de la mauvaise réputation dont jouissait partout son commis, qui allait devenir son meurtrier, Jean Schmitt. Puisque l'homme maintenant assassiné connaissait aussi son valet, il était difficile de comprendre pour quelle raison il ne l'a pas chassé il y a longtemps, d'autant plus qu'il a déjà agi contre lui une fois. Mais peut-être que l'une des raisons de cet acte infâme était sa décision finale de rompre avec le garçon une fois pour toutes et de le bannir de la maison pour toujours.
Ce qui s'est passé cette nuit-là est toujours un mystère. Le jeune Schmitt, au cours de l'interrogatoire préliminaire, s'est révélé être un individu têtu, sournois, au sang froid, au seuil de la déchéance de l'humanité. Il a dit tout ce qui pouvait servir à sa défense au cours du procès à venir, mais s'est sagement gardé d'avouer ce qui était vrai dans l'affaire, et ce qui pouvait éventuellement l'incriminer.
Il n'apparaît donc pas aussi stupide, mais aussi tout à fait sain d'esprit, malgré son séjour temporaire dans un établissement psychiatrique, où il a dû répondre d'un tout autre délit. Jusqu'à ce jour, il n'a pas reconnu quand il a commis ce crime horrible et a toujours répondu qu'il ne s'en souvenait pas. Ce qui est certain, c'est qu'il a tué de manière bestiale une personne qui lui avait fait beaucoup de bien et à qui il était donc très redevable. Ce seul fait devrait suffire à le caractériser et à le juger selon l’appréciation humaine et logique : un sujet sans valeur qui ne mérite plus de cohabiter parmi les hommes.
Il est maintenant rejoint par un autre point d'interrogation, Hellmuth Sandweg. Il a peut-être contribué à l'arrestation rapide du meurtrier, mais en fin de compte, il y avait tout intérêt. Ses récits et témoignages sont tous avérés être fantaisistes ou mensongers. Encore une fois, un mystère plane toujours pour que l'affaire soit résolue. Il est également en détention, ayant admis le vol d'une somme assez conséquente. Dans quelle mesure il avait une connaissance directe ou indirecte du meurtre lui-même, et surtout quand, sans exclure totalement une complicité indirecte ? L'enquête le révélera. En tout cas, tant de questions se posent autour de sa présence obscure au moment où le meurtre a eu lieu et tout est envisageable.
Quant à l'acte du meurtre lui-même, c'est-à-dire la manière, le jour et l'heure où le forestier Georges Dietz a été assassiné, il est impératif d'attendre les conclusions de l'enquête.
Tout n'est que balivernes et fantaisies : personne, à part le meurtrier et peut-être son acolyte Hellmuth Sandweg, ne le sait et ce sont précisément eux qui ne veulent se souvenir. Mais la lumière sera faite et les autorités compétentes ne ménageront aucun effort pour faire toute la lumière sur cette sordide affaire.
Les funérailles de Georges DIETZ se sont révélées être une authentique démonstration de sympathie envers le défunt. Une foule nombreuse, venue de près ou de loin s'était rassemblée lundi après-midi à l'église de Heiligenstein puis au cimetière où le forestier assassiné a été enterré dans la tombe familiale.

 

M. LAUFFENBURGER, Ingénieur des Eaux et Forêts, a dédié une émouvante nécrologie au forestier Georges DIETZ. Il a souligné ses grands mérites en matière de sylviculture et a évoqué le travail précieux qu'il a réalisé dans son district. À titre d'exemple, il a mentionné la plantation exceptionnelle d'épicéas sur le Gutleutrain, que l'on peut qualifier de magnifique, car il y a environ 25 ans, on ne trouvait sur ce site que des broussailles et des haies d'épineux sans valeur, et aujourd'hui, une des plus belles pinède se créée. Ses expériences avec le Douglas importé d'Amérique ont été quasiment pionnières, et aujourd'hui, on affirme que le forestier Dietz en a apporté la démonstration il y a des années. Si, au cours des dernières années, ses forces l'ont quitté contre son gré, notamment en ce qui concerne sa vue, ce n'est pas une raison pour couvrir d'un voile d'oubli toutes ses activités antérieures. Au cours de ses 40 années de service, dont 30 sur le Moenkalb, le forestier Dietz a été un fonctionnaire strict et consciencieux qui s'est dévoué corps et âme à son district du Moenkalb. Après tout, il ne pouvait nier le sang de forestier qui coulait dans ses veines, qu'il avait hérité de ses ancêtres et qui avait été transmis aux membres de sa famille éloignée, et il rendait tout hommage à la tradition familiale si honorable.
 

L'Adjoint M. Louis KLlPFEL, en l'absence du Président du Syndicat, M. Paul Degermann, a transmis au défunt les derniers témoignages de gratitude du Syndicat forestier de Barr et de la Ville de Barr elle-même, pour lesquels il a rendu de grands et loyaux services pendant trente ans. Toujours en sa qualité de vice-président de la musique municipale, M. Klipfel a évoqué les moments chaleureux que les musiciens revivaient chaque année lors de la sortie du 1er mai dans la cour de la maison forestière de Moenkalb.
La famille si durement touchée a été entourée d'une sympathie émue de tous côtés, mais tous les gens ont gardé un souvenir particulièrement affectueux de la vieille mère, qui gisait alors malade dans une maison de retraite et à qui on n'avait pas osé signaler la mort terrible de son fils forestier. Il était toutefois surprenant que cette femme de 85 ans, qui pouvait à peine bouger et donc se tenir debout, se soit soudainement levée en cette nuit de meurtre présumé et ait voulu se rendre au Moenkalb. Elle a entendu des appels de sa fille Marguerite, qui était déjà morte depuis un certain temps, et de son fils Georges. Pendant toute la nuit, elle a dû être surveillée, jusqu'à 6 heures du matin, elle était impatiente de partir. Personne ne se doutait du drame, sauf le cœur de la vieille mère dévouée. Ainsi, au tout dernier moment de sa vie, le fils était si fortement attaché à sa mère qu'elle l'a ressenti. Cet événement ne devait pas rester le seul mystère de cette affaire, si sombre jusqu'alors. 

Hier, jeudi 6 août, la reconstitution du crime sur le Moenkalb a eu lieu. Le juge d'instruction M. GRILLON a présidé cette enquête sur place, assisté de son greffier et du photographe du tribunal. M. Champeil, substitut au Parquet de Colmar et les représentants de la P.J. de Strasbourg étaient également présents. Les autorités locales et le propriétaire de la maison du forestier n'ont pas été autorisés à pénétrer dans les lieux. 
Apparemment, rien de vraiment nouveau n'est à relever. Le meurtrier Jean Schmitt a démontré à sa manière cynique comment il a maltraité le forestier Georges Dietz à l'intérieur de la maison, puis l'a traîné dans la cour. Le deuxième individu arrêté, Hellmuth Sandweg, a également été interpellé. Il semble douteux que celui-ci ait directement participé au meurtre. Néanmoins, son rôle obscur dans l'affaire reste à éclaircir au cours de l'enquête à venir.

1927 - Collision entre deux véhicules.

BARR, 26 juillet 1927


Une collision s'est produite entre le camion de M. Ferrenbach et l'attelage de l'entrepreneur de transport M. Wingert, à l'angle de la rue de la Vallée et de la rue de l'Hôtel du Bühl.

 

Le cheval a été grièvement blessé. Une enquête a été ouverte afin de déterminer qui est responsable de l'accident.

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Dès 1865, la société Wingert assurait le transport des voyageurs entre la gare, le Hohwald, le Mont-Sainte-Odile, les communes voisines et les différents établissements hôteliers du secteur.

Der Elsässer. 1928-07-27

1933 - Une mort atroce

BARR, 5 juillet.
Hier matin, à l'aube, des employés du chemin de fer ont trouvé sur le remblai le corps d'un homme, méconnaissable, gisant en travers des rails. Il s'agit d'un homme d'une quarantaine d'années. Aucun document permettant d'identifier le corps n'a été retrouvé. On suppose qu'il s'agit d'un suicide.
L'Alsacien. 1933-07-06.

A propos de la découverte de corps sur le talus du chemin de fer près de Barr

BARR, le 6 juillet.
Comme nous l'avons déjà annoncé dans notre précédente édition, un employé du chemin de fer a trouvé mercredi matin sur la voie ferrée entre Barr et Gertwiller, à une centaine de mètres de la gare locale, le corps d'un homme d'une quarantaine d'années.
Nous apprenons également que les premières investigations ont confirmé que le malheureux avait été écrasé par le train qui passait à cet endroit vers 5 heures du matin.
Une identification n'a tout d'abord pas été possible, car le défunt ne portait aucun papier sur lui et le corps était horriblement mutilé. 
Il s'est avéré par la suite qu'il s'agissait d'un concitoyen originaire de Barr, Jules Dock, âgé de 40 ans, domicilié dans la rue de l'école et revenu s'installer ici après une longue absence. Il y a six mois, Dock, qui exerce la profession de maraîcher et qui a travaillé pendant de longues années dans une ferme de la vallée de la Bruche, a acheté une petite propriété dans son village natal et s'est mis à travailler comme petit viticulteur et agriculteur. Il a connu un mariage heureux qui n'a pas donné de descendance. De tous côtés, on ne lui reconnaît que de grandes qualités.
Malgré tout, il faut supposer qu'il ne s'agit pas d'un accident, mais d'un suicide, dont les motifs sont à rechercher dans des accès de mélancolie dont Dock, selon ses proches, a parfois déjà révélé des symptômes.
Le tribunal a autorisé l'inhumation du corps.
L'Alsacien. 1933-07-07.

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Train de voyageurs en gare de Gertwiller (photo Blumer)

1926 - Accident Place des Pommes de Terre

Barr, mai 1926
Des parfums bon marché

Notre étroite rue principale a souvent été le théâtre de carambolages plus ou moins importants.
L'un d'entre eux s'est produit ces jours-ci sur la place du marché aux pommes de terre lorsqu'une remorque chargée de longues grumes en provenance de la vallée de la Kirneck a apparemment pris le virage trop court et a complètement fracassé les deux vitrines d'un salon de coiffure.
Les bouteilles et flacons de parfum, les produits de beauté, etc. se sont également brisés, laissant s'échapper des senteurs parisiennes et orientales. Les badauds sont restés de longs moments sur les lieux de l'accident, s'imprégnant avec plaisir de ces parfums bon marché et enivrants qui coûteront toutefois cher aux transporteurs routiers.

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En 1926, l'avenue des Vosges en travaux n'est pas encore ouverte à la circulation. Tout le trafic du bois en provenance de la vallée et le transport des marchandises nécessaires au fonctionnement des usines passent encore par la "Grossdunkelgass" et la place des pommes de terre. 

Traduit d'après le journal Der Elsässer (mai-1926)

1926 - Le parricide du Hohwald.

HOHWALD, 29 déc. 1926 - Depuis quelques temps, la famille G. se disputait. Le père, Louis G., 54 ans, est bûcheron. Il a dilapidé presque tous ses revenus et dans son ivresse a souvent frappé sa femme, mère de 14 enfants. Les scènes de ménage et les brimades subies par Mme G. révoltaient très souvent les enfants, et le fils aîné Thiébaut G. âgé de 17 ans, aurait déclaré à plusieurs reprises à ses voisins qu'il tuerait son père s'il ne se reprenait pas. Cette menace devait être mise à exécution dimanche soir.
Le père G. est rentré tard le soir, ivre, et s'est immédiatement disputé avec sa femme. Le fils Thiébaut (qui n'était donc pas le beau-fils de Diebold, comme nous l'avions rapporté) prit une bûche et donna plusieurs coups à son père avec une telle force que le père G. succomba sous les coups.
Paniqués, les proches ne savaient pas comment dissimuler le crime.

Le lundi matin, informés par les voisins, les gendarmes se sont rendus sur les lieux du crime et Thiébaut et sa mère ont fait comme s'ils n'étaient pas au courant du crime. Ils prétendirent que le père était rentré ivre, était tombé et s'était cogné la tête contre un pied de table si malencontreusement qu'il était mort de sa blessure. Mais au cours d'un interrogatoire approfondi, Thiébaut a reconnu son crime.
L'autopsie du corps a eu lieu lundi. Celle-ci a révélé que le père n'avait vraisemblablement pas été tué avec une bûche, mais avec une hache. Certains habitants du Hohwald affirment que le père G. a été tué par Thiébaut sur ordre et à l'instigation de la mère. Le tribunal de Colmar s'est rendu sur place lundi après-midi pour constater les faits.
Le jeune parricide s'est laissé arrêter sans problème. Il a été emmené à Colmar. 
Un cousin du parricide a commis un crime grave il y a deux ans, de sorte que si l'on tient compte du casier judiciaire chargé d'autres membres de la famille, on peut supposer qu'il s'agit d'une famille dans laquelle les crimes ne sont pas exceptionnels.

HOHWALD, 15 janvier 1927 - Dans l'affaire des homicides de G., l'enquête semble avoir révélé que le père de G. a été tué avec préméditation. 
Comme on le sait, le fils Thiébaut, âgé de 18 ans, et sa mère ont d'abord prétexté un accident pour expliquer le décès.
Au cours de l'enquête, le fils Thiébaut est revenu sur ses déclarations en affirmant qu'il avait assommé son père avec une bûche au cours d'une dispute. 
L'enquête semble à présent disposer d'éléments permettant d'affirmer que G. a été tué d'un coup violent sur le crâne alors qu'il dormait allongé sur le canapé. L'accusation porterait donc sur l'homicide volontaire.
L'affaire sera probablement jugée par la cour d'assises de Colmar lors de la deuxième session de l'année.

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Traduit d'après le journal Der Elsässer (1926-1927)

Le schlittage du bois au Hohwald au début du 20e siècle, un métier rude et dangereux.

COUR D’ASSISES DU HAUT-RHIN
Un parricide et sa mère devant le jury

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La dernière affaire mise au rôle de cette troisième session a vu son épilogue se dérouler lundi après-midi, pour se continuer hier mardi.
C’est l’affaire la plus importante d’une session qui fut considérablement chargée d’affaires de mœurs, et la salle d’audience fut envahie par de nombreux auditeurs bien avant l’entrée en audience de la cour.
Il s’agissait de juger un crime de parricide commis le lendemain de Noël dernier par un jeune homme de 18 ans G. Diebold : peu d’affaires de ce genre ne se produisent, heureusement d’ailleurs ; ce qui est cependant plus que rare, c’est de voir la mère, complice par instructions, au moral, auteur principal, assise au côté du fils : La dame G. Marie, née N., est cette mère. Epouse infidèle pendant la guerre dira l’accusation, son mari, de chagrin, en devint ivrogne et quand il avait bu, il menaçait sa femme en qui germa l’idée de s’en défaire : le fils à peine revenu à la maison, capté, suggestionné, devait commettre ce crime effroyable.
Il s’en rend compte maintenant, alors qu’assis sur le banc de l’accusation il ne cesse de pleurer. La mère, elle, n’a rien qui appelle la sympathie et cherchera-t-elle seulement à atténuer la responsabilité de son enfant : rien ne le laisse paraître.
Dès le début de l’audience, M. L’avocat général Charigaud demande l’adjonction d’un treizième juré, la longueur des débats étant certaine, il faut parer à une défaillance qui pourrait se produire. Cette adjonction est ordonnée par la cour.
Et le greffier lit l’acte d’accusation, réquisitoire précis, serré, que nous publions :
Le 27 décembre 1926, à 6 heures et demie du matin, la gendarmerie de Barr était avisée que Louis G., 54 ans, bûcheron au Hohwald, venait d’^être trouvé mort dans la chambre du rez-de-chaussée de son habitation, gisant dans une mare de sang. Le cadavre était étendu sur un divan, le bras gauche allongé, la tête couchée sur la joue gauche, les jambes pendantes en avant. La mort était due à des fractures du crâne provoquées par plusieurs coups assénés avec une violence extrême, à l’aide d’un instrument contondant.
Interrogés, les membres de la famille G. prétendirent d’abord que louis G. était rentré ivre, la veille au soir, qu’il s’était heurté la tête contre le fourneau et s’était ainsi fait les blessures qu’il portait au front. Cette version paraissant inadmissible, sur l’insistance de la gendarmerie, la jeune Edith G., 14 ans, révélait que son frère Diebold s’était disputé la veille avec son père et l’avait assommé à l’aide d’un rondin. La femme G. déclarait ensuite qu’elle était absente de son domicile dans la soirée de la veille et qu’elle ignorait ce qui s’était passé. Bientôt, elle reconnaissait avoir quitté le logis vers midi et demi, à la suite des menaces de son mari et avoir appris, à son retour seulement, vers 21 heures, que Diebold avait frappé son père au cours d’une querelle.
La même explication était donnée par ledit Diebold. Cependant, dès le 28 décembre, il avouait au magistrat instructeur, en transport sur les lieux, qu’il avait préparé le meurtre d’accord avec sa mère, qu’il avait caché d’avance, sous la couverture du lit, le rondin de sapin qui devait être l’instrument du crime, ajoutant que dans la soirée, au cours d’une dispute, il avait frappé son père, au moment où celui-ci se levait du divan pour chercher une hache. Les constatations matérielles, qui établissent l’absence de lutte, détruisaient complètement ce système, et, dans ces conditions, Diebold G. était bientôt amené à reconnaître qu’il avait, volontairement, à l’instigation et sur les instructions de sa mère, donné la mort à son père alors qu’il était endormi sur le divan.

LE CRIME

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De l’instruction résultent les faits suivants : Depuis le 20 février 1897, les époux G. ont eu treize enfants ? L’accord était loin de régner dans le ménage. Louis G., obligé de faire face aux besoins d’une nombreuse famille était laborieux, mais il avait quelque penchant pour la boisson. De son côté, la moralité de sa femme, née Marie B. n’était pas irréprochable. Des disputes éclataient fréquemment entre les époux, mais la situation s’aggrava considérablement avec l’effet de la guerre. Louis G. fut mobilisé pendant quatre ans. Durant son absence, sa femme et ses filles aînées se livrèrent ouvertement à la débauche avec des soldats en convalescence au Hohwald, à tel point que l’autorité militaire dut interdire l’entrée de la maison G. Après l’Armistice, Louis G, mis au courant de l’inconduite de sa femme, chercha dans la boisson l’oubli de ses chagrins. Il devint un ivrogne d’habitude. Sous l’influence de l’alcool, il proférait des menaces et se livrait même, quoique rarement, à des violences envers les siens, spécialement envers sa femme. Celle-ci finit par prendre son mari en aversion ; elle manifestait ouvertement le désir d’être débarrassée de lui. Elle allait trouver, dans son fils Diebold, l’exécuteur de ses desseins. Ce jeune homme, qui n’avait pas encore 18 ans, était rentré le 7 novembre 1927 au domicile de ses parents pour servir comme domestique dans une ferme près de Bellefosse. La femme G. capta rapidement la confiance de son fils, à qui elle persuada qu’elle était malheureuse, que la vie conjugale était devenue, pour elle, un enfer ; elle exprimait le regret que son mari n’ait pas été tué à la guerre ; elle parlait même de l’empoisonner. Le 26 décembre ; Louis G. sortant après le déjeuner, menaçait sa femme sans raison apparente, de la frapper avec sa hache si elle se trouvait encore à la maison à son retour. Surexcité par sa mère, Diebold en proie à une colère violente, déclarait que si son père rentrait ivre, le soir, il le frapperait de manière à l’empêcher de se relever. La femme G. approuvait son fils et l’encourageait. Sur-le-champ, Diebold allait chercher, au dehors, un gourdin qu’il rapportait dans la chambre en disant : « Maintenant je l’attends, il n’a qu’à venir. »
L’exécution du crime fut immédiatement combinée dans ses moindres détails. La femme G. dissuada son fils de tenter la lutte périlleuse ; Diebold proposa de porter le premier coup au moment où son père enlèverait ses souliers ; la femme G. conseilla d’attendre plutôt qu’il fût couché ; plus prudent encore, Diebold déclara qu’il ne frapperait que lorsque son père serait endormi.
La femme G. afin de ne pas participer personnellement au parricide, se rendit ensuite chez sa belle-sœur, la veuve Louis G. à laquelle elle n’avait plus rendu visite depuis plus d’un an ; mais, auparavant, elle s’était déjà concertée avec Diebold sur les fausses versions à présenter au sujet de la mort de son mari, et elle avait recommandé à son fils de cacher le gourdin sous la couverture du lit et d’écarter les enfants.
Resté seul, Diebold s’ancre dans son projet coupable. A la rentrée du père, aucun incident ne surgit. Le repas du soir se passe dans le calme. Sur l’invitation de son frère, Edith G. emmène les enfants plus jeunes, d’abord à la cuisine, puis dans la chambre du premier étage. Louis G. s’est endormi sur le divan ? Suivant scrupuleusement le programme tracé, Diebold porte à son père, sur le côté droit de la tête, trois ou quatre formidables coups de rondin, qui le laissent inanimé. Le crime consommé, le meurtrier accompagné de sa sœur Edith, vient retrouver sa mère chez la veuve Louis G. Dès que les enfants arrivent, la femme G. fait fermer les volets. Diebold raconte cyniquement la scène du crime ; il rassure sa mère, en lui certifiant que Louis G., s’il respire encore, ne se relève pas. La visite se prolonge afin d’éviter toute rencontre en chemin. Au retour de la famille, Diebold entr’ouvre la porte de la chambre du rez-de-chaussée, la victime râle, le fils se contente de dire : « il ne respirera plus longtemps », et tous montent à l’étage.
Le lendemain, 27 décembre, à la première heure, la femme G. recommandait à son fils de brûler le bâton qui avait servi au parricide et, à l’arrivée de la gendarmerie, elle redoublait ses efforts pour forger des versions de nature à laisser le crime impuni.
Lors de son interrogatoire final, elle a fait des aveux à peu près complets, se bornant à prétendre que, dans son esprit, elle avait envisagé que Diebold donnerait des coups, mais non la mort à son père.
Diebold passe pour laborieux et fait l’objet de renseignements favorables. La réputation de la femme G. est douteuse quant à la probité, et déplorable au point de vue de la moralité. Le fils n’a pas d’antécédents judiciaires. La mère a été condamnée une fois pour recel.

LES DEBATS

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L’interrogatoire n’apporte rien contraire à ce que l’instruction a établi ; la femme G. déclare cependant qu’elle n’a pas poussé son fils au crime et que si elle avait été présente à la maison, il ne se serait rien passé.
La cour procède ensuite à l’audition des témoins : le docteur Hambourger, médecin légiste, a autopsié la victime et ses conclusions sont qu’il y a eu crime et non accident. Le chef de la brigade de la gendarmerie de Barr fit l’enquête première : on voulut lui faire croire à une mort accidentelle, mais les accusés bien « cuisinés se mirent à table » et la vérité vint. Edith G., fille et sœur des accusés, est un témoin à charge important : elle déclare que son père avait, le matin du drame, menacé sa mère de la tuer si elle était encore là à sa rentrée, et avec une hache comme arme. Quand il fut parti, la mère dit à Diebold de le servir à sa rentrée, et Diebold promit. On a vu qu’il a tenu sa promesse malheureuse. Le témoin raconte les préparatifs : Diebold allant chercher un gourdin qu’il fit sécher, sa mère lui disant de la cacher dans le lit et qui ne voulant pas être présente, partit chez la tante Louise, en priant qu’on ne vint pas l’y quérir. Elle aurait même ajouté de faire sortir les enfants quand Diebold commencerait, afin qu’ils ne pleurent pas. Le témoin continue en disant qu’après-souper, le père s’allongea sur le divan et que Diebold vint la trouver et les fit monter. D’en haut elle entendit des coups par trois fois et elle pleura, puis le meurtrier s’en alla retrouver sa mère et les deux complices s’entendirent sur ce qu’ils devaient dire. Un autre frère, Arnold, en voyant son père mort le lendemain matin, dit qu’il allait prévenir les gendarmes qu’ils l’avaient tué.
La dame veuve Louis G., chez qui la femme G. Marie vint le jour du crime, vivait en mauvaise intelligence avec l’accusée ; elle dira que toute l’après-midi l’accusée était inquiète et lorsque le meurtrier vint trouver sa mère, elle demanda aussitôt ce que faisait le père par cette expression : le « vieux ». Diebold déclara qu’il ne se relèverait plus et elle répondit : « S’il était seulement crevé ». Puis ils se concertèrent sur les versions à fournir en cas d’enquête.
La cour, après ce témoignage, suspendit l’audience qui a été reprise hier par la continuation de l’audition des témoins.
Le témoin L. Walter, âgé de 8 ans, déclare que son grand-père n’était pas ivre et qu’il dormait ; il a entendu frapper et ensuite Diebold est allé chercher Edith et la grand-mère ; au retour, il les entendit dire que le grand-père était mort.
La fille aînée dépose ensuite que son père buvait par suite de l’inconduite de sa mère ; elle ne sait rien du crime lui-même. Un autre enfant, G. Sigismond, 29 ans, dit que sa mère lui écrivit que le père devait crever et qu’elle avait souvent des disputes avec lui ; elle aurait même songé à l’empoisonner. Ce n’est pas une mère, ce n’est pas une femme, c’est un « dragon », conclut-il. Sur demande de la défense, il reconnaît que son père l’avait menacé d’une hache.
Toute la famille dépose. G. Arnold, 28 ans, déclare que sa mère vint le réveiller le lendemain : « le père est mort », dit-elle. « Vous l’avez tué », telle fut sa réponse.
G. Albert, frère de la victime, dit que son frère était aimé au Hohwald, mais pas sa mère.
Les autres  témoins entendus confirmeront que le père n’était pas un mauvais homme, mais qu’au contraire sa femme parlait toujours contre lui ; il aimait les enfants, Diebold comme les autres.

REQUISITOIRE ET PLAIDOIRIES

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M. l’avocat général Chaurigaud prononce un réquisitoire sévère, véritable faisceau de preuves, qui démontrent l’intention bien arrêtée de la mère de supprimer l’époux, et il conclura en demandant la peine de mort.
Devant de telles réquisitions, la défense avait une lourde tâche. Me Jacques Dreyfus, pour le fils, tenta d’écarter de lui une sanction dure : Cet enfant n’a été qu’un instrument entre les mains de sa mère, il a tué son père croyant la sauver, et d’ailleurs le père n’était-il pas un violent qui avait été déjà condamné pour violence envers sa femme. Il demande aux jurés de déclarer que Diebold a agi sans discernement, ainsi il évitera le bagne d’où l’on ne revient pas et pourra encore redevenir un honnête homme.
Me Gerthoffer, avocat à la cour, s’émeut d’entendre une conclusion à la condamnation à mort ; ainsi juger une femme qui a eu quinze enfants, dont quatorze vivants, que le mari menaçait continuellement de mort et qui en plusieurs occasions avait dû se réfugier au dehors, croyant sa vie menacée. MM. Les jurés, vous ne pouvez pas répondre aux questions posées, car la preuve n’est pas faite qu’elle fut complice : elle n’a pas armé le meurtrier et ne l’a pas excité par des artifices mensongers, et le pauvre Diebold, à qui vous pardonnerez, a frappé comme un sourd, comme un fou, pour sauver sa mère en danger, croyait-il. La rumeur publique a tout démesurément grossi dans cette affaire et vous ne pouvez vous arrêter à l’opinion publique.
Défense magistrale, s’il en fut, qui se termina par une demande d’acquittement.
Quatre questions étaient posées aux jurés qui se retirent à 16 h 15 pour délibérer. Cinquante minutes après, ils rentrent avec un verdict affirmatif sur toutes les questions, accordant toutefois les circonstances atténuantes aux deux accusés.
La cour condamne G. Diebold à 7 ans de travaux forcés et sa mère à 12 ans de la même peine.
La session est close et M. le président Thumann remercie MM. Les jurés de la clairvoyance qu’ils ont montrée durant toute la session et qu’ils ont rendu une bonne justice qu’il a pu apprécier, lui, fils d’Alsace comme eux, et les jurés crient : « Vive la France ! » avant de se séparer.

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Journal d'Alsace. 1927-07-13.

1925 - Accident de la circulation

HOHWALD, 1er juillet. - Accident automobile


Un léger accident de la circulation s’est produit sur la route menant du Hohwald à Barr, mais il aurait pu avoir des conséquences bien plus dramatiques.

 

Une grande voiture de tourisme appartenant au garagiste Wingert de Barr, qui assure quotidiennement la navette entre Barr et le Hohwald, descendait la route et s'arrêtait sur le côté droit pour laisser passer une petite voiture.

Mais au même instant, une troisième voiture a voulu dépasser la première et la voiture de la société de M. Wingert, qui transportait 24 personnes, a été projetée dans le fossé où elle s’est immobilisée.

 

Seule une aile a été arrachée et fort heureusement personne n’a été blessé.

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C'est probablement un véhicule de transport Renault de ce type qui a été accidenté. (photo R. Flecksteiner)

Traduit d'après le Journal "Der Elsässer" 1925

1924 - Le meurtre crapuleux de la rue Brune

par Christian SCHMITTHEISLER

Meurtre crapuleux à Barr  - Décembre 1924
Une mère et son fils arrêtés

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BARR, 12 janv 1925. - Une très vive émotion s'est emparée samedi de la population de notre ville lorsqu'elle a appris l'arrestation de la mère et d'un des fils de la famille G., marchands de fruits.
La mère et le fils, soupçonnés de vol, ont été emmenés en prison. Parmi la population, on murmurait des choses encore plus effrayantes. On parlait à demi-mots d'un meurtre crapuleux. 

Un septuagénaire vivant seul est découvert mort il y a quatre semaines


Il y a quatre semaines, le vigneron septuagénaire Brenner qui vivait seul à son domicile, est décédé. La mort soudaine du vieillard qui n'a été découverte que deux jours plus tard avait déjà fait sensation. On ne s'expliquait pas la disparition inattendue de ce robuste vieillard. Mais à ce moment-là, personne ne soupçonnait une mort non naturelle.
Les héritiers ont toutefois remarqué que toute la fortune du défunt et une montre en or avaient disparu. Pour éviter les rumeurs, ils avaient renoncé à porter plainte jusqu'à ce que, dans les derniers jours, l’on soupçonnât que Brenner avait été victime d'un crime.


Les soupçons se sont portés sur G âgé de 18 ans et sa mère, qui ont proposé à la vente des titres d'une valeur de 20 000 à 30 000 francs auprès une banque de Strasbourg et de Sélestat. La mère et le fils ne se présentaient pas comme vendeurs ou dépositaires, mais mentionnaient plutôt le nom de leur beau-frère Müller.
La banque qui avait été discrètement informée par les héritiers et la police des soupçons pesant sur les G a retardé la transaction. Entre-temps, la gendarmerie interrogea Müller et constata qu'il n'était pas au courant de l'offre de vente et des titres. Les G ont donc été reconnus coupables de fausse déclaration d'identité.
L’enquête s’est alors accélérée. De la découverte de la fausse identité à celle du vol, il n'y avait qu'un pas. Dans la journée du samedi, G fut arrêté en gare de Sélestat et sa mère au même moment à Barr.

Une enquête rondement menée

 

Une perquisition qui a eu lieu dans l'appartement des suspects a permis de découvrir le reste des titres et la montre en or du vigneron Brenner. Les objets étaient cachés dans le lit de la mère. Malgré ces preuves évidentes, la mère et le fils nièrent le vol.
Ces tentatives de déni devaient renforcer le soupçon que les G avaient bien pire que le vol à se reprocher.

 

Le dimanche, on a procédé à l'exhumation du corps de Brenner au cimetière de Barr. Elle eut lieu en présence du juge et le corps fut transporté dans la chambre mortuaire de l'hôpital civil où l'on procéda à l'autopsie. On y fit une découverte stupéfiante : le corps présentait une profonde blessure à la tête. Aucune information n'a été communiquée sur les autres constatations.

 
Le jeune G a été confronté au corps. Il a nié tout acte de violence, mais il a avoué le vol après un contre-interrogatoire musclé. G affirme s'être introduit dans l'appartement de Brenner, où il a trouvé le vieillard gisant au sol.
Dimanche, G n'a pas pu être contraint à de nouveaux aveux. On a appris aujourd'hui que G avait reconnu le meurtre, mais qu'il niait avoir tué Brenner intentionnellement. Brenner lui aurait fait face alors qu'il pénétrait dans la maison, puis il aurait bousculé le vieil homme, qui serait tombé par terre et aurait été tué dans sa chute.
G accusa sa mère de l'avoir incité à commettre ce crime. Tous deux furent incarcérés à la prison de Colmar.

Les suites de l'affaire

 

BARR, 13 janv. - Le jeune G, âgé de 18 ans, qui a été arrêté avec sa mère, a fait aujourd'hui des aveux complets. Il en ressort qu'il s'est introduit dans la maison du vigneron Brenner, pensant que le propriétaire de 70 ans était absent. Mais ce dernier est rapidement venu à sa rencontre.
Le jeune cambrioleur a donné un coup de poing sur la poitrine du vieil homme, qui est tombé à la renverse d'où la blessure à la tête. Brenner, qui souffrait gravement du cœur est mort en tombant, sans doute de frayeur, d'un arrêt cardiaque sous les yeux du jeune cambrioleur.
L'accusation de vol avec assassinat pourrait alors être abandonnée. Il s'agira probablement d'un vol avec effraction pour le fils et d'une incitation au crime pour la mère. Le jeune G a néanmoins causé la mort du vieil homme et il devra en répondre devant la justice.

Bouc Blanc Rue Brune.jpg

La rue Brune, lieu du crime

Le Procès

 

Cour d'assises de Haute-Alsace,
COLMAR, le 2 juillet. - Le cambrioleur G est condamné à dix ans de travaux forcés.
L'après-midi, les jurés devaient rendre leur verdict dans la célèbre affaire de cambriolage de Grohens à Barr.

 

 Antoine-Charles G, 20 ans, de Barr, est sur le banc des accusés.

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Le 18 décembre 1924, Frédéric Brenner, 70 ans, est retrouvé mort dans son appartement de Barr. Comme le vieil homme était souffrant depuis longtemps, tout le monde pensait que le décès était dû à son affection de longue date. Les héritiers furent cependant surpris de ne trouver ni argent ni titres dans l'appartement du défunt.
Le 10 janvier 1925, M. Emile Müller informa la gendarmerie de Barr qu'il avait reçu une lettre de l'agent strasbourgeois Baumgärtner lui demandant de se présenter chez lui au sujet d'obligations de la ville de Paris et qu'il avait répondu à cette demande. Il rencontra à Strasbourg Mme Baumgärtner qui l'informa que l'affaire avait été réglée la veille, entre son époux et un jeune homme accompagné d'une femme amputée du bras gauche.
Monsieur Müller a tout de suite su qu'il s'agissait de son parent Charles G et de sa mère, Madame G. Quelques jours plus tard, Charles G vint le voir et lui demanda la lettre de Monsieur Baumgärtner.
Suite à ces communications, la gendarmerie ouvrit une enquête. Elle trouva chez Mme G, sous un matelas, des titres, des talons, des obligations de la ville de Strasbourg, 15 coupons Société Générale Alsacienne et 150 Fr.


L'accusé reconnut le vol, mais niait catégoriquement tout meurtre.


Il reconnaissait également avoir vendu une partie des titres volés par l'intermédiaire de M. Baumgärtner et avoir reçu 2800 Fr. en échange. Il a remis à sa mère les titres trouvés chez elle en lui disant qu'il les avait trouvés.
Une fois ces circonstances établies, une autopsie a été pratiquée sur le corps du défunt Brenner. Sur le côté droit du crâne, on a trouvé des contusions qui avaient été causées avant le décès. Il est possible qu'elles aient été l'une des causes du décès, étant donné l'état de souffrance du vieil homme. G avait alors fait des aveux complets. 
Il présenta son délit comme suit :

 

Le 17 décembre 1924, il n'avait pas d'argent. Dans sa détresse, il lui vint à l'esprit de s'introduire dans l'appartement de Brenner pour voler. Il est resté à proximité de la maison jusqu'à 3 heures du matin. Il est entré dans la propriété par le portail de la cour, qui n'aurait pas été fermé. Il est passé par l'écurie et a atteint le premier étage. De là, il est descendu au rez-de-chaussée et a fouillé tous les meubles sans rien trouver. Il retourna alors au premier étage et se rendit dans la chambre à coucher de Brenner. Celui-ci se réveilla et demanda à l'intrus ce qu'il voulait.
Le vieil homme voulut se lever. Aussitôt, G se jeta sur lui et lui cogna la tête contre le mur. Le vieillard tomba inanimé sur les coussins. Alors, G alluma une bougie et commença à fouiller le cabinet de toilette. Dans un tiroir, il trouva des titres, une montre en or et une chaîne de montre. Il s'empara de tout et quitta la propriété.
Le lendemain, il se rendit à Strasbourg et déposa la montre et la chaîne de montre de Brenner au bureau des objets trouvés de la gare, en expliquant qu'il avait trouvé ces objets dans un débarras du train Schleitstadt-Molsheim-Strasbourg. Le jour suivant, il a remis les titres volés à M. Baumgärtner. Sa mère l'a accompagné.

Le verdict

 

L'accusé G est toujours en très mauvaise posture et a déjà été condamné deux fois pour vol.L'interrogatoire de l'accusé est très long. Il a commis le vol avec préméditation, mais nie catégoriquement avoir voulu tuer le vieux Brenner.


Le jury rend un verdict sévère. Il a dû se retirer une nouvelle fois car une imprécision s'était glissée dans le verdict. Après la deuxième délibération, le verdict n'était pas moins sévère. Toutes les questions qui leur ont été soumises ont reçu une réponse positive, à l'exception de celle concernant la violence.


Sur la base de ce verdict, Charles G a été condamné à dix ans de travaux forcés et à dix ans d'interdiction de séjour.

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La Cour d'Assises de Colmar

Traduit d'après le Journal "Der Elsässer" 1925

Accident rue du Général Vandenberg

par Christian SCHMITTHEISLER

deux remarques concernant cette photo issue d’une collection particulière:
Au premier plan, le garage Fergus Daeschler porte l’enseigne de la marque Renault ce qui nous permet de situer l’accident vers 1934.
A l’arrière plan, l’immeuble 13 rue du Gal Vandenberg comporte 9 fenêtres sur sa façade ouest: d'après nos recherches elles étaient peintes en trompe-l'oeil.

Nous n’avons pas pu retrouver d’article relatant les faits, mais il est plus que probable que le véhicule qui venait de Gertwiller a abordé la courbe à vitesse excessive.


Le mauvais état de la chaussée, non asphaltée et très bombée à cet endroit, et un coup de volant trop brusque (peut-être pour éviter un chien errant), auront suffit à faire basculer le petit utilitaire, déséquilibré par son chargement qui s’est répandu sur la chaussée.

 

Vu l’écrasement de la cabine, le conducteur n’est certainement pas sorti indemne de cet accident.

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Le carrefour de la rue du Général Vandenberg et de la rue de la promenade a de tous temps été l’une des zones les plus accidentogènes de notre cité. Non-respect des priorités, franchissement du stop, vitesse excessive… les causes en étaient multiples et variées.


Aujourd’hui, le giratoire qui oblige les usagers à ralentir, apporte une sécurité relative, mais que s’est-il passé en cette journée des années 1930 ?

1925 - La faillite de la Banque Gaston Levy

par Christian SCHMITTHEISLER

Barr 24 avril 1925
Les propriétaires de la Banque Gaston Lévy à Barr sont en faillite provisoire depuis lundi. La déclaration de faillite est imminente. La banque a été fermée aujourd'hui et la gendarmerie a procédé à une mesure de mise sous séquestre. Le parquet a ouvert une enquête.

Villé janvier 1926
Depuis toujours, les habitants du Val de Villé sont habitués, de par leur condition modeste,  à la frugalité et à l'économie. Les caisses d'épargne  existant dans presque tous les villages en sont le témoignage le plus éloquent. Les plus avisés cherchaient même à obtenir des intérêts plus élevés pour les centimes épargnés et confiaient leurs avoirs à la banque Gaston Levy de Barr, qui avait installé une agence à Villé, sans jamais revoir ni intérêts ni capital.

BARR, 5 décembre 1925 
Le banquier en fuite

Le banquier Gaston Levy, qui s'est enfui cet été à l'étranger après avoir escroqué des sommes importantes et modestes à de nombreuses personnes, a maintenant été arrêté en Allemagne. Il se trouve actuellement en garde à vue à Francfort, mais ne peut pas encore être extradé, car il aurait également un passif outre-Rhin. Son arrestation n'aura probablement pas trop d'effet pour les personnes qui ont perdu toutes leurs économies.

Stotzheim 4 mai 1925 - Humour campagnard
Les événements regrettables ont souvent leur côté humoristique, comme le krach bancaire Gaston Lévy à Barr.
Un citoyen local, Ch. Chr., avait déjà dit des choses désagréables sur la banque Lévy-Barr vers Noël 1921, à un confident qui n'avait rien de plus pressé que de rapporter les propos à Monsieur Lévy. Chr. fut prié de retirer ses déclarations comme fausses le dimanche 8 février devant la communauté réunie, ce qu'il fit.
Le dimanche, après l'annonce habituelle de l'huissier local, Chr. a fait la "rétractation" suivante, dans l'hilarité générale de l’assistance :
Chr. estime que la première déclaration de la banque Levy-Barr est vraie et regrette d'avoir été contraint de mentir dans la rétractation du 8 février. M. Gaston Lévy viendra probablement dimanche après-midi, si rien ne se met en travers de son chemin, pour couper les cheveux de ses bons clients, car il les a déjà bien rasés ! Celui qui a subi le préjudice, et cette fois-ci un préjudice important, n'a pas à se soucier des moqueries...
Il est tout à fait regrettable que les personnes concernées n'aient pas fait preuve de discernement et ne se soient pas laissées troubler par des intérêts élevés, les gros pourboires, les beaux discours et de belles promenades en automobile. On parle de plus d'un demi-million que les agriculteurs locaux voient maintenant flotter sur l'Andlau. Il n'y a pas beaucoup de banques solides et presque chaque localité a une caisse d'épargne et de prêt. Mais elles ne paient pas 7 à 10 % d'intérêt.

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Barr, 14 décembre 1926
L'affaire de la banque Gaston Levy a été jugée la semaine dernière par la chambre correctionnelle de Colmar. Le krach de Barr a soulevé à l'époque une émotion extraordinaire, car toute une série de petits épargnants ont été gravement lésés par les escroqueries des frères Gaston et René Levy et ont perdu une grande partie des économies qu’ils avaient faites pour leurs vieux jours. Au cours de l'audience, les pratiques commerciales malhonnêtes, les faux semblants, l'hypocrisie de cette entreprise bancaire particulière ont été dûment stigmatisés. Gaston Levy a ouvert la banque en 1920. De nombreuses réclamations ont suivi. La clientèle des petites gens a fui. Gaston n'avait aucune idée de ce qu'était une banque. Le capital de fondation s'élevait à 30 000 francs. Le premier bilan aurait suffi à justifier la faillite. Mais le frère René Levy arriva, il y eut de nouveaux clients et on continua à "jouer à la banque" avec les nouvelles sommes confiées.


Gaston s'est mis à mener grand train. En quatre ans, quatre voitures, avec à chaque fois des pertes considérables, une vie extravagante, une petite amie sous contrat avec engagement écrit de lui verser une rente annuelle de 20 000 francs, des voyages de prestige, un intérieur luxueux et un train de vie démesuré. Puis la caisse s'est vidée. Gaston est parti en Allemagne. René est parti à Paris. Gaston fut emprisonné en Allemagne pour un soi-disant espionnage pour la France pendant 8 mois et fut ensuite expulsé. René fut aussitôt arrêté à Paris. Ce dernier se retrouva co-accusé. Lorsqu'en 1926, M. Vautrin fut chargé d'examiner les comptes, il dut d'abord constater que la caisse était vide, que les livres présentaient un désordre sans pareil et des écritures en partie falsifiées.


L'actif ne s'élevait plus qu'à 130 000 francs, après liquidation du mobilier, etc., tandis que le passif atteignait presque un million. Les créanciers ne pouvaient plus recevoir que 10 % de leurs avoirs.

Les suites de l'affaire...

BARR, 21 décembre 1926
Un certain Sylvain Levy, ex-directeur de la Banque d'Alger, qui a élu domicile en Alsace, a été poursuivi par le juge d'instruction d'Alger.
L'intéressé est le frère du banquier Gaston Levy, de Barr, qui fait l'objet d'une procédure judiciaire pour escroquerie aggravée.
Sylvain Levy est accusé d'abus de confiance dans plusieurs affaires. La gendarmerie a procédé à son arrestation à Barr et l'extradera vers Alger.

 

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Le scandale de la banque Levy
Colmar,11 février 1927
La chambre correctionnelle de Colmar a rendu hier son jugement dans la tristement célèbre affaire du banquier Levy de Barr : Gaston Levy, propriétaire de la banque, a été condamné à 2 ans de prison et à 500 francs d'amende. Il a été acquitté de l'accusation d'émission de chèques sans provision. Son frère, René Levy, fondé de pouvoir, a été condamné à 6 mois de prison et 500 francs d'amende.

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Ndlr : Les frères Levy ont fait appel du jugement de première instance. Nous n'avons pas trouvé trace de l'arrêt rendu par la Cour d'Appel.

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Les Banques offraient des taux d'intérêts de 5 à 6%. La Banque Levy prétendait offrir un rendement de 7 à 10%.

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Selon nos recherches la Banque Levy était installée dans cet immeuble de la rue Taufflieb. La Banque de Strabourg a repris les locaux en 1926.

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Traduit d'après le Journal "Der Elsässer" 1925, 1926 et 1927

Juillet 1931 - Accident mortel au Messti

Mercredi dernier, les stands du messti ont été démontés à Barr et chargés pour le transport.


En abattant le plancher de l’estrade de danse, M. Florent Schmitt a chuté sous un lourd camion qui lui a écrasé la poitrine.

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Lorsqu'on a retiré le malheureux grièvement blessé de dessous le véhicule, il donnait encore de très faibles signes de vie. Schmitt fut immédiatement transporté à l'hôpital, où il rendit l'âme la nuit même, vers 11 heures.

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Le défunt qui a péri si tragiquement laisse derrière lui une jeune veuve.

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Traduit d'après le Journal

"Der Elsässer" du 1er août 1931

Avril 1931 - Un meurtre à Barr
Un ouvrier d'usine tire sur sa maîtresse et se rend à la gendarmerie

par Christian SCHMITTHEISLER

Un meurtre horrible a mis en émoi les habitants de la région de Barr.
Samedi matin, après une brève discussion, Camill S., 28 ans, ouvrier d'usine, a tiré sur Elise L., 23 ans, un coup de revolver qui lui a été immédiatement fatal. Après cet acte lâche, le meurtrier s'est rendu à la gendarmerie.

La tragédie.
Le samedi matin, à six heures et demie, la jeune Elise L. quitta de bonne humeur la maison de ses parents et voulut se rendre, comme chaque matin, à l'usine Amos et Cie, où elle était employée depuis longtemps comme ouvrière.

Comme elle était un peu en retard, elle monta d'un pas rapide la rue un peu raide qui menait de son appartement à son lieu de travail. C'est pourquoi elle ne vit pas tout de suite son amant, avec lequel elle vivait depuis quelque temps en mauvais termes, et qui l'attendait devant l’entrée de la fabrique de cuir Adolphe Dietz, où il était employé comme journalier.

Ce n'est qu'après le deuxième appel que la jeune fille s'arrêta auprès du jeune homme, qui lui tendit une lettre envoyée par le tribunal, dans laquelle il était dit que le destinataire devait verser chaque mois 150 francs à Elise L. pour l'entretien d'un enfant que le meurtrier avait reconnu comme père. Il s'ensuivit une brève discussion au cours de laquelle la brute prit la jeune fille par le cou et la poussa contre une clôture de jardin qui se trouvait en face de l'usine. A ce moment-là, il lui a mis un revolver sur le front et a appuyé sur la gâchette. Le jeune corps est tombé sans vie sur le sol.

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Après son crime, l'assassin s'est rendu calmement à la gendarmerie. En chemin, il jeta l'arme du crime dans un petit ruisseau, où elle fut retrouvée plus tard. Entre-temps, une foule immense s'était rassemblée autour du lieu du crime, dans un état d'effroi compréhensible. Monsieur le chef de la brigade Poline dirigea l'enquête, qui ne fut pas difficile puisque l'assassin fit des aveux complets. Après l'examen du médecin légiste, la victime a été transférée à l'hôpital de Barr.

Le mobile du crime
En ce qui concerne le mobile du crime, on peut dire ce qui suit : Elise L. entretenait depuis longtemps une relation avec l'assassin, mais les liens entre eux s'étaient récemment distendus. La jeune fille avait donné la vie à un enfant il y a six mois, lorsque S. a reconnu l’enfant. Or, ce dernier ne voulait pas payer la pension alimentaire mensuelle de 150 francs, car, selon lui, il n'entrait pas en ligne de compte comme père, et il n'avait signé que parce qu'il pensait que la jeune fille se marierait avec lui. Mais comme la victime n'était plus disposée à tendre la main à son ancien ami pour s'unir à lui pour la vie, il a accompli cet acte horrible.

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Le portrait du meurtrier Camill S.

Un meurtre prémédité
D'après les faits, on peut conclure que le meurtre a été commis avec préméditation.
Vendredi matin, S. avait quitté son travail à Barr. Il voulait d'abord se rendre à Strasbourg, mais il est finalement descendu à Molsheim, où il a acheté l'arme du crime, un revolver de gros calibre à cinq coups.

Le samedi matin, il revêtit ses habits du dimanche et se rendit à la porte de l'usine où il surveilla la jeune fille et la tua. Le meurtrier, un jeune homme pâle aux yeux enfoncés et aux lèvres retroussées, est connu dans la région pour être un travailleur acharné et n'a pas été condamné. On pourrait faire valoir comme circonstance atténuante de cet horrible meurtre le fait que l'assassin est atteint d'une maladie nerveuse ; c'est aussi pour cette raison qu'il a été exempté du service militaire. Mais il n'y a pas d'excuse pour un meurtre.

Lisa L., en revanche, n'a pas eu un mode de vie exemplaire et a été placée pendant six ans dans une maison de correction. Il convient également de mentionner qu'une belle-sœur de la jeune fille tragiquement disparue est décédée subitement il y a quelques jours alors qu'elle était en visite à Barr.
Même si des faits parlent en faveur de l'assassin, il n'en reste pas moins que ce meurtre reste un crime épouvantable qui mérite un lourd châtiment.

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Les lieux du crime

Traduit d'après le Journal "Der Elsässer" du 19 avril 1931

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