Sur cette page, nous avons réuni les portraits de Barrois qui ont marqué l'histoire de notre cité ou connu des carrières remarquables.
Jean HERMANN (1738-1800)
l'homme de la tortue !
par Christian SCHMITTHEISLER
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Peu connu des Barrois, Jean Hermann est né à Barr en 1738, fils aîné du pasteur Jean Hermann et de Marie Madeleine Eisenmann. Son père est ensuite nommé à la paroisse actuelle du Temple-Neuf à Strasbourg où la famille s’installe.
Élève au Gymnase, puis étudiant à la Faculté de médecine, il s’intéresse dès son jeune âge à l’histoire naturelle, dont il donne des cours privés dès 1764.
En 1769 il épouse Frédérique Cléophé, fille du médecin Samuel Frédéric Koenig et de Catherine Cléophé Kuntz, dont il a deux enfants : Jean Frédéric en 1769 et Frédérique Christine Dorothée en 1771.
Le ménage est paroissien de Saint-Nicolas et loge quelques temps dans la maison zum Hanekrote (au Cri du Coq), 9 place Saint-Thomas.
Médecin, leur fils Jean Frédéric meurt du typhus à l’hôpital militaire en 1794, ruinant les espoirs de son père. Il a eu en effet le temps de se faire connaître comme zoologiste.

Jean Hermann, médécin et botaniste
Sa carrière
En 1769, Jean Hermann est nommé professeur extraordinaire de médecine, avant d’obtenir en 1779 la chaire de philosophie, en 1782 il devient titulaire de pathologie, puis en 1784 il reprend la chaire de chimie, matière médicale et botanique, et enfin en 1794, dès l’ouverture de l’Ecole de Santé, il obtient la chaire de botanique et matière médicale.
Son cabinet abrite des collections exceptionnelles, notamment de zoologie, minéralogie, botanique, mais aussi une bibliothèque riche de 20000 ouvrages rehaussés de nombreuses notes manuscrites.
Sa carrière est interrompue en 1792 par la suppression de l’Université. L’ouverture en 1794 de l’École de santé lui permet de reprendre ses cours, tout en enseignant les sciences naturelles à l’École centrale du Bas-Rhin à partir de 1795. Privé de laboratoire, il conduit ses expériences dans sa cuisine.
Son oeuvre
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Hermann dirige en outre le jardin botanique. de Strasbourg. Celui-ci est menacé de fermeture par l’administration de la ville durant la Révolution, il n’a dû son salut qu’à l’opiniâtreté d’Hermann qui lui consacre toute sa fortune.
Son œuvre la plus importante paraît en 1783 sous le titre de Tabula affinitatum animalium... cum annotationibus ad historiam naturalem animalium augendam facientibus. (classification des vertébrés)
« Observationes zoologicae quibus novae complures » est publié en 1804 à titre posthume.
En relation épistolaire avec l’ensemble du monde savant de l’Europe, il est élu membre de nombreuses académies étrangères et, en 1796, membre associé non-résident de l’Institut national.
On lui attribue d’avoir épargné sous la Révolution la destruction des statues du portail de la cathédrale qu'il aurait enterrées au jardin botanique, et qui furent restaurées plus tard à l’initiative de son frère, Jean Frédéric, alors maire de Strasbourg.
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Sa renommée internationale lui a valu la dédicace du nom de la tortue provençale dite «tortue d’Hermann», qu’il a été le premier à décrire.
Un mannequin en costume de son époque est censé le représenter, assis au milieu de son cabinet de curiosités, mais le Musée expose aussi son buste. Son portrait, gravé par Christophe Guérin, le dépeint sérieux et pensif.
RECONSTITUTION DU CABINET D’HISTOIRE NATURELLE DE JEAN HERMANN

Le musée est né du rachat en 1804, par la ville de Strasbourg, de la totalité des collections d'histoire naturelle de Jean Hermann (1738-1800). Dès la refondation de l'université de Strasbourg en 1872, celle-ci se voit confier la gestion scientifique et la valorisation des collections. Depuis, elles n'ont cessé de s'enrichir.
La reconstitution du cabinet d'histoire naturelle de Jean Hermann au sein du musée zoologique a été achevée en décembre 1988.

Le buste de Jean Hermann au musée zoologique de Strasbourg
par Christian SCHMITTHEISLER
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Le Docteur Charles SULTZER (1770-1854)
Médecin Cantonal
Charles Michel Sultzer est né à Strasbourg le 15 avril 1770 de Jean Michel Sultzer, serrurier et de Marie Madeleine Drouel. Il est élève du collège épiscopal d’où il sort lauréat peu avant 1789.
Après ses études il entre comme novice au couvent des bénédictins de Marmoutier, dont son oncle est prieur.
Après quelques mois il retourne dans le monde et assiste le chirurgien en chef François-Laurent Marchal (1748-1814), qui exerce à l’hôpital de Strasbourg.
A l’époque, l’art chirurgical ne nécessitait nullement des études médicales universitaires. Il effectue sa formation médicale et chirurgicale à l'Hôpital de Strasbourg.
Ses études
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A la Révolution, il est nommé chirurgien aide major dans un bataillon de la Garde Nationale de Strasbourg.
Lorsque fut créée l’École de Santé de Strasbourg (14 frimaire an III, 4 décembre 1794), chaque district de la région de l’Est reçut la mission de désigner un élève pour l’Ecole, lequel devait «porter dans son cœur l’amour de la liberté, la haine des tyrans et un entier dévouement à la République».
Charles Michel Sultzer est en 1794-1795 l’élève à l’École de santé désigné par le district de Strasbourg, choisi par une commission de trois membres, composée des professeurs Thomas Lauth, Jean-Jacques Spielmann et Jean-Louis Tinchant.
Après avoir tenté de participer à une expédition militaire que le Directoire envisageait de monter contre les Indes anglaises, Sultzer termine ses études médicales le 15 messidor an IX (4 juillet 1801), par une thèse : Dissertation renfermant la description d’un ver nouveau contenu dans le canal intestinal humain. Cependant le doyen honoraire Callot a établi plus tard que ledit ver nouveau, le «Bicorne rude», était en fait un simple débris végétal.
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Un intérêt marqué pour les sciences naturelles, l’amène également à assister un de ses maîtres, le célèbre naturaliste strasbourgeois Jean Hermann, dont il réalise une partie des dessins qui illustrent ses descriptions botaniques et zoologiques.
Le médecin praticien
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Après son installation à Barr en 1803, il épouse Anne Marie Thomas le 28 juillet 1804 (19 Messidor an XII). Aucun enfant ne sera issu de cette union, mais les époux accueilleront à leur domicile la mère, puis la nièce du Docteur Sultzer, Sophie Julie Sultzer, qu’ils élèveront comme leur enfant.
Le Docteur se consacre sans compter à une nombreuse patientèle et selon les cahiers qu’il tient méticuleusement, son activité recouvre près de 60 communes. Selon l’usage en vigueur à l’époque, le montant de ses honoraires varie en fonction du déplacement et de la situation sociale du malade.
Dans ce Journal de visites, apparaît aussi, de façon concrète, tout un monde de petites gens, de petits métiers d’un assez large secteur d’Alsace qui constitue un témoignage vivant et précieux des maladies et du tissu social de l’époque.
D’origine modeste, il tient consciencieusement le compte de ses recettes médicales, des loyers qu’il perçoit ainsi que de ses dépenses.
En homme cultivé et passionné de botanique, il consacre une bonne partie de ses disponibilités à la constitution de sa bibliothèque, à l’entretien de son jardin et aux voyages. La fortune qu’il s’est constituée en gestionnaire avisé, lui permet de consentir des prêts à un taux d’intérêt variant de 4 à 5%.

Charles Michel SULTZER
Docteur en philosophie et médecine
Médecin des épidémies pour l'arrondissement de Sélestat et Médecin cantonal de Barr

La dissertation du Dr Sultzer à propos du "Bicorne rude"
Le médecin cantonal
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En 1810, il devient médecin cantonal de Barr et d’Obernai et médecin des épidémies de l'arrondissement de Sélestat.
La médecine cantonale avait en charge la médecine des pauvres et les praticiens les plus désintéressés étaient sollicités pour en faire partie afin que les indigents désignés par les bureaux de bienfaisance puissent être soignés gratuitement.
Décrit comme dévoué, consciencieux et infatigable, son activité déborde largement du cadre du canton qui lui était assigné. Il assure par ailleurs six tournées annuelles dans chacune des communes du canton.
C’est un fervent défenseur de la vaccination contre la variole qu’il dispense lors de séances de vaccinations hebdomadaires organisées à la Maison Commune.
Il est membre de l’Académie Royale de Paris et correspondant de nombreuses sociétés savantes.
En 1829, Sultzer est nommé agrégé à la Faculté par le pouvoir royal mais il décline ces fonctions. Il demeure professeur agrégé libre de la Faculté de Médecine de Strasbourg.

La maison à colonnes du Dr Sultzer
L'expert anatomiste
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Le Docteur Sultzer est à plusieurs reprises sollicité en qualité d’expert-anatomiste.
Les expertises anatomiques et anthropologiques les plus exceptionnelles qu’il réalise sont celles des ossements de Sainte-Odile en 1836 et 1841 et de Sainte-Richarde en 1841.
Son testatement
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Touché par le décès de son épouse le 5 mars 1853, et en l’absence de descendance directe, le Dr Sultzer prend ses disposition testamentaires.
Il laisse de nombreux legs dont les plus importants reviennent à la maison des orphelines de Ste-Barbe à Strasbourg (10000 Frs.), à sa nièce Sophie 15000 Frs.) et à la Ville de Barr pour la construction d’un hôpital (24000 Frs.). Son vœu sera réalisé en 1867 par la construction de l’Hospice devenu aujourd’hui EHPAD Marcel Krieg.
L’ensemble de ses legs s’élève à la somme considérable de 65000 Frs et il laisse en outre une importante et précieuse bibliothèque d’ouvrages de botanique annotés de sa main.
Atteint par la maladie, il reste fidèle au serment d’Hippocrate en exerçant ses fonctions jusqu’à quelques jours de sa mort qui survient le 30 juillet 1854 à son domicile de la rue de la Lime (aujourd’hui rue Sultzer)
Pour honorer son généreux donateur, la Ville fera ériger un monument réalisé par le sculpteur Feuerstein au cimetière protestant.
Sur son socle, on peut lire :
A CHARLES SULTZER
MEDECIN CANTONAL
CHEVALIER DE LA LEGION D’HONNEUR
AU SAVANT, A L’HOMME DE BIEN
LA VILLE DE BARR RECONNAISSANTE
DECEDE LE 30 JUILLET 1854

Le monument érigé en sa mémoire par la Ville de Barr
Sources :
Ville de Barr
Annuaire 1968 de la Société d'histoire et d'Archéologie de Dambach la Ville - Barr - Obernai
Richard HARTMANN (1809-1878)
du forgeron au roi de la locomotive !
par Christian SCHMITTHEISLER
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Richard Hartmann est né le 8 novembre 1809 à Barr, où son père tenait une boutique de cordonnier. Il fut baptisé le 12 novembre. Le boulanger Johannes Dietrich, le tanneur Samuel Kleinmann, Maria Eva Zimmermann, épouse du tanneur Johannes Rath et Anna Maria Brunner épouse du chapelier Georg Friedrich Dietz, furent ses parrains et marraines.
Dès son plus jeune âge, il a fait preuve d'un esprit et d'un sens très vif. Il apprend le métier de serrurier ou plus exactement de taillandier (Zeugschmied) auprès du maître Georg Dietz, à Barr.
Après avoir fréquenté l'école à Barr et Lunéville, suivant la coutume de l'époque, il part en compagnonnage le 19 juillet 1830. Son périple le mènera par Strasbourg et Wissembourg en Alsace, puis en Allemagne à Karlsruhe, Heidelberg et Mannheim.
Au cours de ses pérégrinations en Thuringe, il rencontre en 1832 à Iéna, son compatriote Georg Samuel Apffel, qui souhaite s'installer à Chemnitz. Apparemment, la description de la ville saxonne par Apffel a éveillé la curiosité de Hartmann, car en mars 1832, il est arrivé à Chemnitz, en passant par Greiz et Zwickau.

Richard Hartmann 1809 - 1878
L'installation à Chemnitz
Il a trouvé son premier hébergement, avec deux « Thalers » en poche, dans l'auberge "Zum Schwartzen Bär" de la Klostergasse et son premier métier dans la plus grande entreprise de construction mécanique de l'époque, Carl Gottlieb Haubold, qui employait déjà 200 personnes. En peu de temps, Hartmann a fait son chemin jusqu'à devenir un professionnel reconnu.
En 1837, Hartmann et Franz Carl Iling, qu'il avait rencontré chez Haubold, fondent leur propre atelier à Annaberger Straße 539a et commencent à y réparer des machines à filer avec trois collaborateurs. Très vite, ils se mettent à fabriquer leurs propres machines à filer.
Il s'est fait connaître par l'invention de la "Continue", une carte de pré-filature, pour laquelle il a ensuite déposé un brevet et reçu la "Goldene Preismedallie" du gouvernement saxon.
Dans le cercle de ses compagnons de corporation, Hartmann est connu comme étant jovial, sociable, buveur et toujours prêt à faire de bonnes farces. Il n'est donc pas surprenant que son nom soit également connu dans les milieux des dames de Chemnitz.
Il fait connaissance avec la fille de l'aubergiste Wilhelm Oppelt et s’en éprend. Le mariage avec Bertha Auguste Oppelt est célébré le 11 octobre de la même année et 2 fils et 2 filles sont nés de cette union.
La production de machines à vapeur
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En 1840, Hartmann se sépare d'Illing et s'associe avec le marchand August Götze. Comme la maison d'habitation et l'atelier ne répondaient plus aux besoins, l'atelier a été transféré au 35 Augustusurger Straße. Ici, une «Göpel», machine à vapeur de 17 chevaux est déjà utilisée.
Avec le début de la production de machines à vapeur, de nouveaux locaux de production sont à devenus nécessaires. C'est ainsi qu'entre le 5 et le 10 juillet 1841, l'entreprise déménage dans la "Klostermühle", plus spacieuse, à l'emplacement de l'actuelle Commerzbank et du quartier de maisons voisin de la future Hedwigstraße.
Le canal de l'ancien moulin du couvent permettait d'utiliser la force hydraulique pour entraîner les machines-outils. Un moteur à vapeur de 12 CV de la propre production de l'entreprise complétait la technique d'entraînement.
En 1842, 200 ouvriers étaient déjà employés dans l'entreprise.
Götze et Hartmann se séparent en 1843 et Hartmann continue à diriger seul l'entreprise.
Après un incendie le 29 août 1845, Hartmann déplace une partie des ateliers dans ce qui était alors la Leipziger Strasse, aujourd'hui Hartmannstrasse. Petit à petit, il y étend son activité, des deux côtés de la rue.
1855 voit le début de la construction des turbines, des machines-outils ainsi que d’équipement d’excavation pour les mines. On y trouve six machines à vapeur de 150 ch et 540 machines auxiliaires. Le nombre d'ouvriers d'usine s'élève à près de 2000.
Si Richard Hartmann est connu en dehors de Chemnitz aujourd'hui, c'est sans doute principalement en raison de son activité de construction de locomotives. Il n'était pas le premier en Saxe à se tourner vers cette industrie. Avant lui, Andreas Schubert d'Übigau, Carl Gottlieb Haubold et August Rabenstein, tous deux de Chemnitz, se sont essayés à la construction de locomotives.
Pour se préparer à la production de locomotives, Hartmann, ainsi que le futur chef de ce nouveau département, l'ingénieur Theodor Steinmetz, entreprennent un voyage en Angleterre en 1845. Le but de ce voyage était non seulement d'acquérir une expérience pratique mais aussi d'acheter les machines de production nécessaires.

Richard Hartmann et son épouse Bertha

Maschinenfabrik Götze & Hartmann 1840-1842

Maschinenfabrik Götze & Hartmann 1842-1845
La fabrication de locomotives
Le 1er juillet 1846, après une demande au roi de Saxe, il obtient un prêt de 30 000 « Thalers » pour lancer la production de locomotives et acheter les machines indispensables. Les ateliers sont constamment agrandis et adaptés aux nouvelles exigences : en 1846, une fonderie de fer et une nouvelle forge sont construites.
La construction de la première locomotive a commencé en 1847 et s'est achevée en janvier 1848. Chemnitz ne disposant pas de liaison ferroviaire à l'époque, la locomotive a été partiellement démontée, chargée sur des charrettes tirées par des chevaux et transportée à Leipzig. Après le montage et un essai le 5 février 1848, la locomotive "GLÜCKAUF" a été remise aux chemins de fer de l'État de Saxe-Bavière. Six autres machines ont suivi jusqu'en septembre.
Les locomotives de Hartmann étant de valeur égale à celle des locomotives anglaises et étant également beaucoup moins chères, les chemins de fer royaux saxons ont désormais acheté la majorité de leurs locomotives à Chemnitz.
L'achèvement de la 100e locomotive, qui devait également porter le nom de "HUNDRED", a eu lieu le 18 avril 1858 et le 3 juin 1878, la 1000e locomotive fut achevée. L'expansion constante de l'usine s'est accompagnée d'une augmentation de la production. Le hall construit en 1867 permettait la fabrication de 100 locomotives par an.
Hartmann qui était à la tête de l'entreprise depuis de nombreuses années, soutenu par ses fils Richard et Gustav et par son gendre Keller, a fait de son usine une entreprise mondialement connue et réputée. Ses machines de toutes sortes ont été reconnues comme des références et ont été primées dans toutes les expositions (Paris, Londres, Berlin, Dresde, Leipzig)

La première locomotive Hartmann
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Les ateliers
La société par actions
Au printemps 1870, un comité a été constitué pour former une société par actions avec cinq branches : Une usine de locomotives, une usine pour machines-outils, une usine pour les machines à vapeur, une usine pour les machines à filer et une usine de métiers à tisser et d'équipements de tissage. Le capital social a été fixé à 2,5 millions de « Thalers ».
Richard Hartmann a pris la présidence du conseil de surveillance de la société par actions et le 1er avril 1870, l'entreprise a pris le nom de Sächsische Maschinenfabrik AG, Chemnitz.

Un enfant de Barr
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Lors de sa séance du 12 mai 1884, le conseil municipal de Barr, réuni sous la présidence du maire Richard Dietz, a adopté la résolution suivante :
"A la demande de son Président,
Considérant que le Conseil Municipal, dans sa séance du 10 mars 1884, a décidé la numérotation de toutes les maisons de cette ville, et qu'il paraît donc opportun de donner également des noms convenables à quelques nouvelles rues qui sont actuellement encore sans appellation,
Considérant en outre que ce serait d'abord une œuvre de reconnaissance que de donner à la «Neugasse», dans laquelle est né le 8 novembre 1809 l'éminent ingénieur mécanicien Richard HARTMANN, décédé à Chemnitz le 16 décembre 1878 (maison n° 17 du côté gauche), le nom de cet homme illustre, qui occupe une place si remarquable dans le domaine de la construction mécanique, en reconnaissance des grands services qu'il a rendus à sa ville natale par diverses donations substantielles, le conseil décide à l'unanimité que le nom Hartmannsgasse soit ajouté à Neugasse."
Ainsi, ses concitoyens honorèrent sa mémoire en donnant son nom à sa rue natale et le Club Vosgien dénomma «Hartmannsbroennel» la fontaine en contre-bas du petit kiosque entre la M. F. Moenkalb et le château du Landsberg.
II est regrettable qu'après 1918 un chauvinisme outrancier ait débaptisé la rue Richard Hartmann, car ce dernier, décédé trop tôt, était certainement étranger aux entreprises de l'Allemagne Wilhelmine ou Hitlérienne. Cette injustice a été réparée depuis.
Il n'a jamais oublié sa ville natale et ses origines et est toujours resté une personne charitable et socialement engagée. Il a notamment contribué en 1852 avec 250 Marks à l’achat des orgues de la nouvelle église protestante de Barr et légua à sa mort 16.000 Marks (la valeur de plusieurs immeubles) à l'hôpital de Barr.
En toutes hypothèses, Barr peut être fier d'avoir vu naître Richard Hartmann.
Sächsische Maschinenfabrik AG Chemnitz, vers 1878

La maison natale de Richard Hartmann, rue Neuve à Barr

Plus de 4000 locomotives ont été produites par la marque
L’héritage industriel
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Gustav, le deuxième fils de Richard Hartmann, prend la direction de la Sächsische Maschinenbau AG Chemnitz en 1870, puis la présidence du conseil de surveillance à partir du 1er janvier 1881, fonction qu'il exercera jusqu'à sa mort.
Après la guerre franco-allemande, le volume des commandes a augmenté à tel point que les installations de production, la fonderie, l'atelier de chaudronnerie ont encore dû être agrandis en 1872/73.
Quelques années plus tard, la production de locomotives a connu un certain déclin et pour la première fois dans l'histoire de l'entreprise des salariés ont été licenciés vers 1875.
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À la recherche de nouveaux marchés, Gustav Hartmann se rend en Extrême-Orient et en Amérique du Sud en 1883 et pendant son séjour en Russie, il a constaté un grand besoin en locomotives.
Après avoir surmonté les obstacles bureaucratiques, et obtenu une garantie d’achat de 240 locomotives, il fonde une usine de machines russes Hartmann à Lougansk[1] le 3 mai 1896. La plupart des équipements nécessaires ont été fournis par Sächsische Maschinenfabrik AG et Lauchhammer AG et en 1904, 600 locomotives avaient été construites.
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En 1889, la fabrication de machines frigorifiques a été lancée à Chemnitz, l'accent étant mis sur la fabrication de machines textiles.
À la fin du XIXe siècle, les besoins en locomotives augmentent à nouveau. Le 10 août 1894, la 2000e fut achevée et douze ans plus tard, le 1er mars 1906, la 3000e.
La nouvelle fonderie a été construite sur Limbacher Strasse dans le quartier d'Altendorf en 1896/97 et était considérée comme la plus grande fonderie d'Allemagne centrale.
[1] aujourd'hui Louhansk , Ukraine)

Gustav Hartmann 1842-1910
Son oeuvre humaniste
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Richard Hartmann était déjà préoccupé par les conditions de vie de ses employés vers 1860. il a notamment créé une caisse d'assurance maladie et accident permettant aux travailleurs de percevoir un revenu en cas d'absence pour maladie ou accident du travail.
Il a également alloué des bourses aux étudiants méritants et légué des sommes conséquentes aux écoles et lycées techniques.
Edouard Keller, gendre de Richard Hartmann et directeur de la SMF à l'époque, a fondé la «Home Foundation» en 1884. Un site de 51 200 m² sur la Beyerstraße a été acheté, transféré à la fondation et la construction de bâtiments résidentiels a débuté.
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En 1911, 47 maisons avec 121 appartements à loyer modéré avaient été construites pour ses salariés. La cité a été classée et fait partie intégrante du paysage urbain.
L'expansion de l'entreprise se poursuit
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Afin de suivre la production en constante augmentation, le 1er avril 1911, la Sächsische Maschinenfabrik a repris l'ancienne usine de Wiedsche de la Hannoversche Maschinenbau-Actien-Gesellschaft, anciennement Georg Egestorff, en tant que succursale pour la fabrication de machines de préparation de filature et cardage.
Le 24 juin 1912, l'entreprise a célébré son 75e anniversaire par une «grande cérémonie». Dans l'usine principale d'une superficie totale de 126 000 m², il y avait 116 bâtiments et ateliers différents. La fonderie d'Altendorf était l'une des plus grandes d'Allemagne avec 125 000 m².
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Pour produire de l'énergie, des moteurs à vapeur et des turbines à vapeur d'une puissance totale de 6 000 ch ont été installés dans la propre centrale électrique de l'entreprise.
500 cadres et 5 000 travailleurs étaient employés dans l'entreprise.
La Sächsische Maschinenfabrik disposait de 59 agences dans les centres industriels les plus importants, 31 en Allemagne et 28 à l'étranger pour la vente de ses produits.
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Richard Hartmann a mis en place une brigade volontaire de pompiers d'entreprise après l'incendie destructeur du 17 juillet 1860, au cours duquel de grandes parties de l'usine ont été détruites, avec une compagnie de près de 100 pompiers et un équipement complet qui intervenaient aussi à l'extérieur de l'entreprise.

La cité ouvrière Hartmann à Chemnitz

Les usines de Chemnitz en 1909

L'atelier de chaudronnerie
La Grande Guerre
Avec le début de la Première Guerre mondiale, les livraisons de locomotives à l'étranger se sont arrêtées, de nombreux clients étant parmi les opposants de l'Allemagne. 2000 ouvriers avaient été enrôlés dans l'armée en 1915.
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Dès 1848, la fabrique de machines de l'époque, Richard Hartmann, avait reçu une commande pour fabriquer 20 000 fusils à culasse mobile et percussion par aiguille. Grâce à son bon équipement technique et à ses capacités de production, l'entreprise a été un partenaire privilégié pour l'attribution des contrats d'armement. En plus des grenades, des mines, des lance-mines et des canons, des cuisines de campagne, des wagons couverts et des wagons de munitions, 82 tracteurs à vapeur ont été fabriqués pour l'artillerie et 49 locomotives d'un écartement de 600 mm ont été construites pour la Heeresfeldbahnen.
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Malgré les activités pour l'armée, le développement de la production s'est poursuivi. En 1915, la construction de pipelines et de machines à coke a commencé.
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Le 9 mars 1918, la 4000ème locomotive est remise à la Königlich-Sächsische Staatseisenbahn. C'était la locomotive à vapeur express la plus puissante d'Europe à l'époque et la seule locomotive à vapeur composite à quatre coupleurs et quatre cylindres jamais construite en Allemagne. Avec la désignation «Sachsenstolz», elle représente le point culminant de l'ingénierie des locomotives saxonnes.

L'entreprise produit des chariots de transport de munitions et des cuisines roulantes de campagne

La "Sachsenstoltz", la locomotive la plus puissante d'Europe
Au sommet de son activité
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En 1920, par exemple, la SMF loua les ateliers d'artillerie des anciennes usines d'armement saxonnes, l'arsenal de Dresde, et élargit ses capacités de production en 1921 grâce à une fusion avec Walter Löbel AG.
La même année, la fusion avec le König-Friedrich-Augusthütte à Freital-Potschappel a lieu. Le nombre d'employés dans toutes les usines s'élevait désormais à 10 420 personnes.
Un témoignage visible de ces succès fut l'agrandissement du bâtiment administratif sur Chemnitz Hartmannstrasse en 1922. Une aile a été ajoutée au bâtiment existant, le portail d'entrée a été déplacé au centre de la façade et deux paires de statues plus grandes que nature - des forgerons et des fondeurs - ont été ajoutées.

Le déclin
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En raison de la situation économique mondiale en 1923/24, la situation des commandes se détériore de plus en plus. Lorsque la Deutsche Reichsbahn-Gesellschaft a été fondée, les priorités de la construction de locomotives étaient en Prusse. Lors de l'attribution du contrat par le comité des locomotives, dans lequel la SMF n'a obtenu qu’une faible part de commandes, la Sächsische Maschinenfabrik a perdu son principal client.
Le déclin de l’entreprise devait rapidement suivre. En 1926, la construction de machines-outils a été abandonnée, l'espace loué dans l'arsenal de Dresde a été délaissé et la construction de machines textiles a été transférée à Chemnitz.
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En 1928, la SMF n'employait que plus que 2 800 travailleurs. La production de locomotives a cessé en 1929, avec une petite locomotive diesel à deux essieux.
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Entre 1848 et 1929, 4611 locomotives ont été fabriquées dans l'usine fondée par Richard Hartmann.
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Le 8 avril 1930, le conseil d'administration a proposé la liquidation de l'entreprise à l'assemblée générale, avec la possibilité de maintenir la construction de machines textiles.
Exactement 100 ans après l'arrivée de Richard Hartmann à Chemnitz, la démolition de l'usine a commencé en 1932.
Le bâtiment administratif a été acquis par l'État et remis à la police, qui y a installé son quartier général. Il ne subsiste aujourd’hui qu’un seul bâtiment industriel qui semble promis à la démolition.
Le siège social devenu quartier général de la police

Le dernier atelier de construction de locomotives

La loco à moteur diesel, dernier modèle produit par l'entreprise en 1929
L'hommage à l'homme et
​à son œuvre
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Ainsi s’achève l’aventure industrielle de Richard Hartmann, un capitaine d’entreprise hors pair qui a profondément façonné et marqué l'histoire de sa ville d’adoption.
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Chemnitz n’a pas manqué de célébrer le 200e anniversaire de sa naissance de 22 août 2009. Lors d'une cérémonie solennelle, une plaque de bronze a été dévoilée dans la gare principale, pour commémorer le travail de l'ingénieur et l’industriel.
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Le 18 juin 2009, la Ville de Barr lui a accordé le titre de citoyen d’honneur et a donné son nom à l’une de ses rues (au tout début de la route de Sélestat, près du passage à niveau.)
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Plaque commémorative en gare de Chemnitz
Sources :
European Route of Industrial Heritage
Journal de Barr
Photos : Sächsisches Eisenbahnmuseum
Emile BIECKERT, le brasseur barrois oublié
(1837-1913)
par Jean-Yves et Yannis Lafond
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Industriel, brasseur et homme d’affaires, Émile Bieckert est né à Barr en 1837. Diplomate, bâtisseur et chevalier de la Légion d’honneur, sa vie fut marquée par une réussite et un succès énorme en Amérique du Sud. Il est, encore aujourd’hui, ancré dans la mémoire des Argentins. À Buenos Aires une école porte son nom et à Nice, on trouve une avenue « Émile Bieckert ».
L ’ héritage barrois
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Fils de Jean Bieckert et de Marie-Madeleine (née Luginsland), Émile Bieckert voit le jour le vendredi 16 juin 1837 à Barr (2). Il grandit « Quai du Saule » à Barr (aujourd’hui 23 rue de la Kirneck) et est l’aîné d’une fratrie de six enfants. À l’âge de 11 ans, Émile perd sa mère et son père se remarie un an plus tard, en 1849, avec Anne-Marie Obrecht. Deux enfants naîtront de cette deuxième union.
Nous savons peu de chose de la prime jeunesse du petit Émile, mais il est facile de s’imaginer qu’il s'épanouit autour des cuves de la brasserie familiale, entouré d’odeurs de malt fermenté, de houblon, de levures. Son père l’initie inévitablement au métier de brasseur et lui transmet son savoir-faire.
Certains écrits argentins affirment qu’Émile aurait « quitté la France à 15 ans sans un sou et travaillé sur le bateau pour la traversée... ». Cependant, on trouve Émile Bieckert dans les recensements barrois pour les dernières fois en 1851 et 1856 (3). Il semble plus probable que Émile Bieckert ait quitté la France entre 19 et 21 ans (période à laquelle on le retrouve à Buenos Aires)

2 Etat-Civil Barr, Naissances 1837, n°83. AD67, 4 E 21/6 (Vue 23/53)
1 Portrait d'Émile Bieckert (publié dans le magazine El Mosquito du 11 mars 1883)
Un contexte argentin attirant
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À partir de 1816, le nouvel état argentin s’émancipe et devient indépendant, le gouvernement désire que la nation se modernise et gagne sa place dans l’ordre économique et politique mondial. À cette période, le pays compte à peine une centaine de milliers d’habitants et en 1850, sa population totale avoisinera seulement le million. Cette pénurie d’habitants (le Pérou et la Bolivie sont alors plus peuplés) est à l’origine d’une politique en faveur de l’immigration
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L’Argentine dispose d’immenses étendues de terres et d’une économie principalement agricole, mais le pays manque de main d’œuvre pour exploiter cette surface. Dès lors, l’immigration européenne s’inscrit dans la Constitution de 1853 et en devient un principe fondamental.
De nombreuses campagnes de propagande destinées à attirer l’immigrant européen s’en suivent alors qu’au même moment des agences de l’immigration s’implantent dans les pays européens. De surcroît, la révolution des transports rend les voyages intercontinentaux de moins en moins aléatoires.
Nous ne savons pas pourquoi, un jour, Émile Bieckert choisit de franchir le pas et décide de rejoindre l’Argentine. Il est cependant mentionné dans les écrits argentins qu’il a quitté sa ville natale de Barr à la recherche de nouveaux horizons.
Alors, soucis familiaux, économiques, ou simplement le goût de l’aventure ? Toujours est-il qu’il embarque à Bordeaux, destination Buenos Aires pour une traversée d’une cinquantaine de jours.

3 : Recensement de la famille Bieckert à Barr en 1856. Émile Bieckert y est bien présent.
Barr, recensements 1841 (vue 70/94), 1846 (vue 57/78), 1851 (vue 117/158) et 1856 (vue 36/96). AD67, 7M241-242-243


Les débuts en Argentine
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Émile Bieckert débarque à Buenos Aires vers 1856. À cette époque, l’état argentin met tout en œuvre pour accueillir les migrants. Ils peuvent bénéficier d’aides pour trouver un logement, un travail. Tout est fait pour faciliter l’intégration des nouveaux arrivants.
Dans ce contexte, il est très vite embauché comme brasseur, dans l’établissement de Juan Bueler.
À cette période ont lieu les premières tentatives de production de bières locales en Argentine et Juan Bueler est un des pionniers avec sa marque « Santa Rosa ». Toutefois, le breuvage issu de ces premiers essais est assez loin de la qualité des bières européennes de l’époque. En effet, les brasseurs argentins font face à de nombreuses difficultés : il faut importer l’orge et le houblon, souvent seule l’eau de pluie est disponible. Alors, Émile, rebaptisé « Emilio » apporte son savoir-faire en tant que brasseur alsacien et prend vite du « galon » dans l’entreprise de Juan Bueler (4).
Très rapidement, vers 1859, il quitte l’entreprise et part pour le Chili. Cette nouvelle aventure ne durera qu’un an, sans que nous sachions à ce jour quel a été le motif de ce voyage. Il est cependant fort probable que son contrat de travail dans l’établissement de Juan Bueler ait eu une clause de non-concurrence, l’empêchant d’exercer son métier sur le territoire argentin durant une année.
Quoi qu’il en soit, Emilio revient à Buenos Aires avec la ferme intention de s’y installer définitivement. Il décide alors de prendre son indépendance et de lancer la fabrication de sa propre bière. Les écrits argentins en précisent la date exacte : le 15 février 1860 (date encore considérée comme « charnière » dans l’histoire de la bière en Argentine !).
L’histoire nous dit aussi qu’Emilio Bieckert a démarré dans une arrière-cour avec l’aide d’un ouvrier et seulement de deux tonneaux. On sait même que sa brasserie artisanale se trouvait face à l’église Balbanera, dans la troisième cour d’une maison de quartier (5)
4 Cervecería BIECKERT (« La Brasserie Bieckert »), Politica Del Sur (« Politique du Sud », journal en ligne) 2020
5 Marcarde, Auguste. Voyage à la Plata. Le Figaro. Supplément littéraire du dimanche, du 21 avril 1888. Bibliothèque nationale de France. (vue 63)
En 1861, le succès est notable. Le savoir-faire d’Emilio acquis à Barr auprès de son père révolutionne la bière argentine, sa bière se démarque des expériences de ses prédécesseurs. Très vite, il est obligé de déménager sa petite brasserie artisanale dans des locaux plus appropriés et plus spacieux, au N° 12 sur la « Calle Salta » à Buenos Aires. La Bière Bieckert continue de gagner en notoriété, et la production est rapidement au maximum des capacités des nouvelles installations.
Emile Bieckert est cité dans tous les écrits comme quelqu’un d’intelligent, avec une capacité de travail hors du commun : il innove, trouve des partenaires, des fournisseurs et des distributeurs fiables, il développe en peu de temps un réseau autour de lui.
Il a, indéniablement, un sens inné des affaires. Son travail acharné rend, quatre ans plus tard, les locaux à nouveau trop exigus, le succès est tel qu’il doit construire une véritable usine.
C’est certainement lors de ses recherches de terrains pour sa nouvelle usine qu’il rencontre Bernardo Ader, qui deviendra son beau-frère. Bernardo Ader est un Français qui a fait fortune en Argentine, il a quitté le Pays basque pour échapper aux conflits socio-économiques du monde basque français de l’époque. Menuisier de formation, il a créé puis revendu une menuiserie à Buenos Aires, plus tard il se spécialise dans l’achat et la revente de biens immobiliers.
En 1866, face à l’augmentation incessante de la demande pour sa bière, la construction de la nouvelle usine Bieckert commence...
Par la même occasion, Émile épouse à Buenos Aires, Simone Ader, sœur du magnat de l’immobilier argentin.
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Il est à noter qu’Émile Bieckert bénéficie d’un contexte extrêmement favorable. En effet, la politique d’immigration bat son plein, et ce sont des centaines d’immigrants européens buveurs de bière, qui débarquent quotidiennement à Buenos Aires...
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« La cheminée de l’usine Bieckert est tellement imposante qu’elle est répertoriée sur les cartes marines et également sur les plans d’accès au port de Buenos Aires. »

La première usine Bieckert. (Publié dans le Magazine El Mosquito en 1886. Archives Nationales d’Argentine)
La réussite dans les Affaires...
L’entreprise « Compania Cerveceria Bieckert » a un succès fulgurant. La nouvelle usine fonctionne à plein régime et pour l’équiper, Émile retourne en France plusieurs fois pour y acheter le matériel le plus innovant et le plus performant.
De plus, afin de consolider le savoir-faire appris durant son enfance, il recrute et fait venir des maîtres brasseurs alsaciens pour les employer dans son usine.
Les choix et la stratégie adoptés par notre Barrois font de la brasserie Bieckert une des industries les plus modernes d’Argentine (6).
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Les installations Bieckert sont citées dans les journaux spécialisés, aussi bien sur le continent américain qu’en Europe (7).
Sa bière se vend dans tout le pays et bientôt le reste du marché de l’Amérique du Sud s’ouvre également à la bière Bieckert. Emilio finit par dominer le marché de la bière dans le pays. En peu de temps il devient le premier producteur de bière en Argentine.
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Publicité pour la bière Bieckert (1898. Archives générales d’Argentine)


Photographie de Bernardo Ader, beau-frère d'Émile Bieckert (source : Bureau central des études historiques de la ville de Buenos Aires)

Le couple Bieckert à Buenos Aires
(Collection JY Lafond)

À cette l’époque, la réfrigération est un problème. Pour pouvoir réfrigérer, la seule solution est d’importer de la glace par bateaux spécialisés des États-Unis (glace de l’Hudson). Une puissante firme nord-Américaine de l’époque la revend à prix d’or. Émile casse ce marché en important pour son usine des machines ultramodernes pour la fabrication de glace. En entrepreneur aguerri, il surdimensionne les machines achetées en Europe ce qui lui permet de vendre une partie de sa production. Alors, en 1880 il devient également le premier producteur de glace en Argentine (8).
Grâce à cette réussite, il achète des terres et au moins une ferme (la ferme « I probe diablo »). Il est fort probable que le but était de faire pousser l’orge et le houblon qui sont alors importés d’Europe ou du Chili.
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Il retourne plusieurs fois en Europe durant cette période (9). Il participe à l’exposition universelle de 1878 à Paris (10), où sa bière remporte un prix. Il en est de même pour l’exposition de Bruxelles de 1897.
Pendant ses voyages, il passe systématiquement par Barr. Il fait ériger un monument très imposant sur la tombe de ses parents au cimetière protestant (toujours visible aujourd’hui). En 1888, il participe financièrement à la reconstruction du clocher de l’Église protestante.
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6 Cervecería BIECKERT (« La Brasserie Bieckert »), Politica Del Sur (« Politique du Sud », journal en ligne) 2020
7 Société académique du Bas-Rhin pour le progrès des sciences, des lettres, des arts et de la vie économique. Bulletin de mai 1890. Bibliothèque nationale de France, département Collections numérisées, 2008-260341 (vue 256)
8 ¿Tanto lio por un rico y suculento... "helado" ? («tant de problèmes pour une riche et succulente « glace » ?) Metejon De Barrio (blog) 2012
9 Les registres des passagers au départ de Bordeaux (AD33, côtes 8M266 et 8M267) indiquent plusieurs voyages transatlantiques d’Émile Bieckert, en particulier en 1864 et 1868.
10 Catalogue officiel : liste des récompenses, Exposition universelle internationale de 1878, à Paris. Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-Z LE SENNE-11295 (vue 468)

Tombe des parents d'Émile Bieckert au cimetière protestant de Barr
(crédit photo : Jean-Yves Lafond)

Travaux sur l'Église protestante de Barr en 1888 (collection privée de Philippe Schultz)
Emilio Bieckert devient, en une trentaine d’années de travail, d’investissement et d’innovation, extrêmement riche et fait partie des plus grosses fortunes d’Argentine.
À partir de cette période, il devient « Don Emilio » et on le retrouve cité dans certains écrits comme le Baron Bieckert.
En 1889, à 52 ans, il vend sa brasserie à un consortium anglais « Bieckert Brewing Company Limited » pour une somme estimée entre 800 000 et 1 000 000 de francs-or.
Il est cependant actionnaire de cette nouvelle entreprise et ne fait que confier la gestion de la brasserie Bieckert à un conseil d’administration. On peut noter que le futur président d’Argentine, Carlos Pellegrini, en fait partie.
Afin de satisfaire les autres actionnaires, Emilio Bieckert respecte un engagement contractuel en gérant la brasserie pendant deux ans, mais également en assurant une rentabilité de 7 % par an (11).
Les entreprises Bieckert vont à partir des années 1880 bien au-delà de la seule activité de la brasserie. Emilio investit toujours dans l’immobilier, mais aussi dans des secteurs où il est moins attendu. Par exemple, en 1888, les entreprises Bieckert ont signé avec l’état argentin une convention pour l’immersion d’un câble transatlantique, destiné à la communication télégraphique entre Buenos Aires et l’Europe (12). Même si ce projet sera mainte fois reporté par manque de financement de l’état argentin, on en déduit l’importance des entreprises Bieckert et leur large éventail d’activités. Ce sera finalement seulement en 1910, avec le câble de l’île de l’Ascension que la ville de Buenos Aires sera reliée à Lisbonne.
Par ailleurs, il participe activement au développement de Buenos Aires et devient un acteur majeur dans les relations franco-argentines, notamment au travers de son rôle au consulat de France, ce qui lui vaudra sa Légion d’honneur en 1891. Lors de l’attribution de cette médaille par le ministre des Affaires étrangères, Émile Bieckert est mentionné dans les écrits comme Consul de France à Buenos Aires (13).
11 La Cerveza de Emilio Bieckert (« La Bière d’Emilio Bieckert »), El arcón de la historia Argentina (« Le trésor de l’histoire Argentine », blog) 2015 12 Journal télégraphique du 25 juillet 1889. Cable entre l’Europe et la République argentine. Bibliothèque nationale de France, département Sciences et techniques, 4-V-1216 (vue 164)
13 Journal officiel de la République française du 21 juin 1888. Composition du bureau de la chambre pour l’exercice 1888. Bibliothèque nationale de France, département Centre technique du livre, 2009-100524 (vue 2575)

Inauguration de l'Odéon en 1891 (Collection privée) en présence d'Emile Bieckert

l'Hôtel Royal à Buenos Aires (Carte Postale, vers 1900)
En ce qui concerne l’immobilier, Émile Bieckert fait construire à Buenos Aires plusieurs hôtels dont le célèbre Hôtel Royal. Mais surtout, il fait construire le théâtre Odéon. Aujourd’hui détruit, l’Odéon est construit au coin mythique de « Corrientes » et de l’avenue Esmeralda. C’était un des plus importants de la ville. L’inauguration a eu lieu en 1891 en présence d’Émile (14). Le théâtre est destiné à un public averti et d’importantes compagnies dramatiques européennes s’y produisent entre concerts et conférences. En juillet 1896, on y programme même la première projection de film en Argentine.
On retrouve également d’autres bâtiments célèbres dans toutes les grandes villes d’Argentine dont la construction est attribuée à « Don Emilio ». De nombreuses propriétés ont été léguées ou cédées à ses sœurs (qui l’ont rejoint et se sont mariées en Argentine) et aussi à ses neveux et nièces du côté de son épouse (Ader).
À l’issue des deux années où il s’est engagé à gérer la brasserie après la vente de celle-ci, il quitte Buenos Aires et s’installe à Nice avec son épouse. C’est la fin de son aventure argentine. Émile Bieckert est maintenant milliardaire.
14 Gaultier-Garguille. Propos de Coulisses, Gil Blas du 9 février 1893. Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-209 (vue 4)
Retour en France
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Vers 1900, accompagné de son épouse, il arrive à Nice (à cette époque, Nice attirait les fortunes du monde entier). On pourrait penser qu’après une telle carrière en Argentine et à plus de 60 ans, Émile Bieckert aurait profité d’une retraite dorée sur la promenade des Anglais. Mais notre infatigable Barrois va réaliser ici une œuvre monumentale qui est encore présente aujourd’hui.
On s’en souvient, 1905 est le début de la séparation de l’Église et de l’État. Par conséquent, les fonds viennent à manquer aux nonnes du couvent Sainte Ursule. La Villa Gabriel et les dizaines de milliers de mètres carrés qui les entourent sont mis en vente et c’est là que notre Barrois intervient : il achète le couvent pour le transformer, et recomposer tout ce territoire (15).
Émile Bieckert crée alors un parc « hygiénique de déambulation », et un parc hôtelier. Il crée l’hôtel Hermitage, l’hôtel Bristol et la Villa Beau-Site, situés sur le boulevard Carabacel. Il contribue à ouvrir de nombreux hôtels dans ce quartier grâce aux talents de bâtisseurs tels que Charles Dalmas. Il utilise les compétences de la famille Agid, une dynastie d’hôteliers venus d’Autriche-Hongrie.

l'Hôtel Hermitage à Nice (Carte Postale)

Le domaine Carabacel (Dessin anonyme, 1900)

Avenue Emile Bieckert à Nice
Ensuite, c’est un concept nouveau qu’il va faire naître sur cette colline, « Le Domaine de Carabacel », un lotissement dont l’argument principal — mis en avant par la publicité de l’époque — était la beauté des jardins. L’idée d’Émile Bieckert est de concevoir une « cité-jardin », au caractère privé. Ce concept est encore inexistant à cette époque et préfigurerait d’un bon siècle les « gated communities » ou propriétés closes, que l’on trouve actuellement aux USA (16)
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Le couple Bieckert est très investi dans la vie niçoise. On retrouve le couple cité par la « presse people » de l’époque lors de soirées mondaines et d’inaugurations diverses.
Les nombreuses réalisations d’Émile Bieckert lui ont valu une reconnaissance de la ville de Nice. Une avenue porte son nom.

Domicile des Bieckert à Paris
Durant cette période, le couple Bieckert continue de voyager. Ils partagent leur temps entre résidence niçoise et parisienne. À Paris, ils ont acquis un hôtel particulier le long du Parc Monceau, au 6 avenue Ruysdaël
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Emile Bieckert à Nice vers 1905 (collection personnelle Jean-Yves Lafond)
15 Une avenue de Nice dénommée d’après un de nos ancien concitoyens, Journal de Barr du 6 avril 1962.
16 Fidler, Cathie. Balade sur l’avenue Bieckert. Gratitude (Blog) 2017
Le décès d’Émile Bieckert
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Son épouse Simone est décédée à Nice le 19 février 1909. Elle lègue à l’église d’Aureilhan (Hautes-Pyrénées), sa ville natale, la somme de cinq mille francs or (17).
C’est quatre ans plus tard, dans son appartement parisien, le 19 juillet 1913, qu’Émile Bieckert décède (18).
Il est enterré au cimetière de Montmartre. À l’entrée du cimetière, en prenant le premier escalier sur la droite, on arrive sur le chemin des Gardes. La sépulture d’Émile est là, non loin de celle de Dalida (19).
Le couple Bieckert n’ayant pas d’enfant, c’est à ses beaux-frères et à ses neveux et nièces qu’Émile léguera son immense fortune. Ces derniers firent don à l’Hôpital de Barr une somme considérable de 20 000 marks, soit 25 000 francs or.

17 Recueil des actes administratifs de la Préfecture du département de la Seine, Legs dame Bieckert.
18 Etat-Civil Paris 8e arrondissement, Décès, n°1359. Archives de Paris, 8D145
19 Avis de décès d’Émile Bieckert. Figaro : journal non politique du 23 juillet 1913. Bibliothèque nationale de France
Caveau Bieckert au cimetière de Montmartre à Paris (crédit photo : Jean-Yves Lafond)

La Bière Bieckert
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La bière Bieckert existe donc depuis 1860. Et même si « Don Emilio » est décédé en 1913, la marque a continué d’exister jusqu’en 2012, soit 99 ans après la mort de son créateur.
En 1908 une nouvelle usine voit le jour à Llavallol (au sud de Buenos Aires), sur un terrain de 100 000 m².
Après la mort d’Emilio, l’entreprise change de mains plusieurs fois entre 1913 et 2008.
La marque est rachetée pour la dernière fois par le groupe chilien Cisca pour plus de 90 millions de dollars. En 2012 dans le jeu des rachats et des monopoles, la marque disparaît...
La légende argentine, l’oubli barrois
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Nous souhaitons finir par l’apparition des moineaux à Buenos Aires. La légende argentine attribue leur arrivée à notre Émile Bieckert. On raconte que l’homme avait apporté par bateau non seulement les machines nécessaires à l’installation de sa brasserie, mais aussi des cages avec des moineaux de Barr, sa ville natale d’Alsace. Et comme il n’était pas d’accord avec les frais de douane excessifs qu’il devait payer, il a ouvert les cages et les a relâchés au port...
Émile Bieckert est une légende en Argentine. On lui attribue non seulement l’arrivée de moineaux, mais aussi des chevaux percherons pour tirer les lourdes charrettes contenant les fûts de bière, et surtout, il est considéré comme le créateur de la bière argentine. Pour certains, il a même été le premier à élever l’industrie en Argentine au même niveau que celui des pays d’Europe de la fin du 19ème siècle. Tous les Argentins connaissent « Don Emilio », beaucoup connaissent son histoire et grâce à lui la ville de Barr n’est pas inconnue dans ce pays. À Buenos Aires, l’école primaire N° 4 porte le nom de « Emilio Bieckert ».
À Nice, il est mentionné comme un bâtisseur innovant. Aujourd’hui encore, ses réalisations impressionnent par leur modernité. La municipalité ne donna pas son nom à une rue de la ville si elle n'avait pas eu une forte reconnaissance envers la personnalité de Émile Bieckert.
Peu de Barrois ont entendu parler d’Émile Bieckert. Il semble qu’il ait été, en quelque sorte, victime de l’Histoire. Né à Barr dans une famille modeste, il n’y avait aucune raison de se soucier de son destin. Émile choisit en Argentine d’opter pour la Nationalité française pendant que sa ville natale devient allemande. Il fait carrière en tant qu’expatrié français et travaille très étroitement avec le ministère des affaires étrangères français au consulat de Buenos Aires. Il meurt à Paris juste avant la Guerre de 1914, et Barr est toujours allemande à ce moment-là. Il est finalement normal qu’aucune « reconnaissance » de sa ville natale n’ait lieu à cette époque. La durée de la guerre et les préoccupations qui ont suivi ont fait qu’Émile Bieckert a été oublié de la municipalité barroise bien que grand bienfaiteur à plusieurs reprises.

Cet incroyable destin d’Émile Bieckert dévoilé permettra à cet homme hors du commun, «Don Emilio» d’être connu et apprécié à sa juste valeur dans sa ville natale.


Victor-Ernest NESSLER (1841-1890)
Le fils de Pasteur qui devient compositeur...
par Philippe SCHULTZ
Sans doute que son lointain lien de parenté avec le grand Beethoven dont il est, de par sa mère, cousin au 10ème degré, n’est pas totalement étranger à ce don pour la musique !
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C’est en 1848 que le pasteur Nessler prend ses fonctions à Barr. La famille s’installe au presbytère et y demeurera jusqu’à la mort du pasteur, en 1883.
Victor passe 6 années de sa tendre jeunesse à Barr, tout en apprenant le piano avec l’organiste local. Il se lie d’amitié avec Edouard Schuré qui a le même âge que lui. Ils parcourent ensemble, avec sa sœur Mathilde, le pays de Barr, ses forêts, ses collines et châteaux. Bien plus tard, il aimera se souvenir de ces belles années barroises.
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En 1854, Victor entre au gymnase protestant de Strasbourg. Son père le prédestine à la voie pastorale, comme son frère ainé Charles. Mais Victor ne rêve que de musique ! Il joue du piano, compose des chants et met en musique des psaumes qui seront exécutés par une chorale strasbourgeoise dont il est membre. Il connait ainsi ses premiers succès qui lui rapporteront la somme de 700 francs qu’il enverra sans hésiter à la Ville de Barr, pour les pauvres !
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A 20 ans, en 1861, il entre à la faculté protestante de Strasbourg. Dès 1864, le théâtre de Strasbourg joue son premier opéra : Fleurette. C’est un succès ! Victor est face au choix de sa vie… Il ne sera pas pasteur ! Il décide de se consacrer entièrement à sa passion et s’installe la même année à Leipzig, en Allemagne, alors véritable haut-lieu de la musique.
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A Leipzig, Victor se perfectionne au piano, dirige des chœurs d’hommes et compose. Imprégné de la double culture française et allemande, il finit par s’y sentir bien, malgré quelques difficultés à s’adapter à la vie en pays Saxon. Mais son cœur restera attaché à la France.
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Victor progresse, car il est un infatigable travailleur ! Il compose des chœurs, des Lieds, des opéras et opérettes. En 1879 il obtient son premier grand succès en Allemagne : un opéra en 5 actes : le « Rattenfänger von Hameln ». Si l’œuvre ne rencontre que peu d’intérêt en France, elle sera néanmoins interprétée à Londres. Victor sera très heureux et fier d’apprendre que ses parents et sa sœur aient pu assister à sa représentation à Strasbourg, en 1880.
En 1884, Victor arrive au sommet de sa gloire. Son Opéra, dans la pure tradition romantique allemande, : « der Trompeter von Säckingen », composé sur un livret de Bunge, connait un succès immense. Il sera joué des centaines de fois. Le grand Gustave Mahler le dirigera même à Prague, en 1885. A Strasbourg, il sera à l’affiche une trentaine de fois, entre 1889 et 1910.
Admirant plus que tout le grand Wagner qu'il avait rencontré en 1871, Victor Nessler rentre à Strasbourg en 1884. Mai l'immense succès de son meilleur opéra se traduira, pour lui, en une pression énorme...
Désormais, il lui faudra composer à l'égal des grands de l'époque ! Malheureusement, les deux œuvres qui suivront seront de cinglants échecs. Les critiques ne l'épargneront guère, ce qui le meurtrira profondément.
Victor Nessler meurt le 28 mai 1890, à l'âge de 49 ans. Ses obsèques, présidées par le maire de Strasbourg, furent grandioses et émouvantes. Il repose désormais au cimetière St-Gall de Koenigshoffen, aux côtés de son petit-fils et de sa femme Julie.
Une souscription publique fut lancée par ses amis, ce qui permit l'inauguration, en 1895, d'un imposant buste en bronze sur socle en grès rouge, œuvre du sculpteur Marzolff et de l'architecte Hurg, en face du pavillon Joséphine du parc de l'Orangerie, à Strasbourg.
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Des rues portent le nom de Victor Nessler à Strasbourg, Barr et Baldenheim, son village natal, où l'on peut également contempler une jolie sculpture, plus contemporaine, représentant le compositeur pensif et inspiré par le fameux trompettiste héros de son opéra.
D'aucuns prétendent que la mélodie phare de cet opéra "der Trompeter von Säckingen" qui fit sa renommée, "Behüt'dich Gott" (Que Dieu te protège), lui fut inspirée dans le jardin du presbytère de Barr, peu de temps avant son départ pour Leipzig.
D'autres estiment qu'il ne s'agit-là que d'une légende...
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Personne, toutefois, ne pourra nier l'influence, sur sa personnalité et son œuvre, de ces belles années passées à Barr !
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Victor Nessler est né le 28 janvier 1841 à Baldenheim (67).
C’est là qu’il passe les premières années de son enfance, à l’ombre du clocher de l’église dont son père Charles est le pasteur.
Dès l’âge de quatre ans, il fait preuve d’un véritable talent pour la musique, jouant au piano en suivant simplement son instinct musical.


Baldenheim - presbytère - maison natale

Barr- Presbytère

Baldenheim - place de la mairie

Strasbourg - Orangerie


Strasbourg - Cimetière St-Gall (Koenigshoffen) - section 6-1-2
Sources : Gabriel Braeuner - Le compositeur Victor Nessler (1841-1890) - De la gloire à l'oubli (2017)
https://www.histoires-alsace.com/category/cites-hommes/portraits/page/2/
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Henri Gachot - Strasbourg - Annuaire de la Société d'Hstoire et d'Archéologie de Dambach-la-Ville - Barr et Obernai (1980)
Claude-Charlier https://www.musicologie.org/Biographies/n/nessler_viktor.html​​
Emilie SCHULER (1856-1930)
Une vie au service des autres...
par Valérie SCHULER
et Philippe SCHULTZ


Avec sœur Lydie, les 2 femmes deviennent très rapidement inséparables et complémentaires. Ce couple unique de sœur propagent une joie sans fin à être au service des autres.
C’est ainsi que le 20 juillet 1921, elle obtient une médaille d’honneur de l’Assistance Publique, récompense pour services exceptionnels rendus.

Emilie SCHULER est née le 24 avril 1856, la 4ème de 5 enfants, après Jacques, Louise (1852) et Caroline (1854), Julie vint ensuite (1857). Fille de Jacques SCHULER et Louise WINTER , mes arrières-arrières grands parents.
Selon un hommage rendu, en 1930, par la paroisse de Barr, elle était active et travailleuse à l’école, comme dans sa famille nombreuse. Après la mort de ses parents qu’elle entourera de ses soins et accompagnera jusqu’à la fin, soigner les malades devient une nécessité et une joie dans sa vie. En plus de son travail de magasinière à l’orphelinat du père APPEL, lorsqu’en juin 1894 sœur Lydie Hetzel rejoint le dispensaire de Barr, Emilie s’investit toujours davantage : elle prodigue des soins et accompagne des centaines voire des milliers de personnes souffrantes au sein de la communauté de Barr.
Emilie SCHULER est restée célibataire. Au sein du Diaconat, son goût du travail, sa compassion, sa bonté et son sens de l’humour plein de finesse, l’amène en toute occasion à rendre les gens heureux. Partout où il y a avait quelque chose à donner, elle était la première à agir.
On lui connaît plusieurs adresses, toujours à proximité de l’Église. Notamment chez le tonnelier JOST dans la "Hartsmannsgasse" ou rue Neuve, au diaconat, chez sœur Lydie HETZEL "im Hiesel", ou plus généralement au Kirchberg.
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En 1908 elle acquiert en effet le "Mairehiesel" à la famille DIETZ, toujours visible sur les hauteurs de Barr. Elle le revendra en 1930, quelques semaines avant sa mort.


"Sœur Lydie Hiesel"
Sœur Lydie HETZEL
Dans le "Messager de la Paroisse" n° 78 de juillet 1933, Mme Jules DEGERMANN rendait un vibrant hommage à ces deux âmes charitables : "Est-il besoin de rappeler ce que ces deux âmes d'élite ont été pour notre commune ? Toujours prêts à donner leurs soins, leur appui, leur temps aux malades, aux affligés, riches ou pauvres, jeunes ou vieux, s'appuyant l'une sur l'autre, s'entraidant dans leur noble tâche, la diaconesse laïque et la religieuse ont été un exemple constant d'entraide mutuelle et de dévouement fraternel.
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Lorsqu'on savait Sœur Lydie HETZEL ou Mademoiselle SCHULER auprès d'un malade on se rassurait à son sujet, car on était sûr que les soins les plus minutieux lui étaient prodigués par ces garde-malades admirables et que l'entourage était réconforté par leur exemple et par les bonnes paroles qu'elles trouvaient à dire."
L'éditeur du "Messager" conclura son hommage aux deux soignantes par ce joli poème : " Wenn zwei zusammen durch das Leben ziehn - Kann durch die Liebe auch die Wüste blühh'n. - Die ware Liebe ist im Dienen gross, - In Liebe dienen ist ein selig Los... " (Quand deux êtres traversent ensemble la vie, l'amour peut faire fleurir le désert. Le véritable amour grandit dans le service. Servir dans l'amour enrichit l'âme...)
En automne 1918, après une grippe, elle subit une première crise cardiaque, signe avant coureur d’un durcissement des artères. Une crise en 1923 puis une autre quatre ans après, alors qu’elle soignait ses chères fleurs devant le dispensaire. A chaque fois de nombreuses cartes postales d’encouragement lui arrivent de partout. En août 1930 alors qu’elle se rend à Guebwiller pour se reposer, elle subit sa dernière attaque. Sœur Lydie accourt à son chevet, mais le mal l'emportera...


Emilie SCHULER disparut le 14 septembre 1930, un dimanche matin, vers 6h15, à l'âge de 74 ans, 4 mois et 21 jours...
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Sœur Lydie, comme le précisa Mme Jules DEGERMANN, "... a continué à elle seule l'œuvre de dévouement à laquelle sa chère compagne avait si noblement collaboré; mais elle a fléchi sous le poids de la tâche, malgré toute sa bonne volonté." Elle disparaitra à son tour, le 27 juillet 1936, à l'âge de 72 ans. Les deux femmes reposeront ensemble, dans la même tombe aujourd'hui disparue, au cimetière protestant de Barr.
Le Docteur Frédéric HECKER (1861-1920)
Maire de Barr de 1912 à 1920
par Christian SCHMITTHEISLER
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Un médecin apprécié
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Le Docteur Frédéric Hecker, fils de Frédéric Hecker exerçant la profession de boucher et de Marie Doll, est né le 11 octobre 1861 à Munster.
Issu d’une famille bourgeoise et aisée, sa mère lui fait donner des cours privés pour lui permettre d’accéder à l’Ecole Supérieure. Il poursuit ses études au Gymnase Protestant de Strasbourg où il obtient l’Abitur, avant d’intégrer la faculté de médecine de Strasbourg où il soutient sa thèse de doctorat.
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Après plusieurs stages en Allemagne, en Autriche et à Paris, il s’établit à Munster en tant que médecin praticien.
Le 27 février 1890, il épouse Mathilde Degermann, la fille de Gustave Degermann, tanneur à Barr. Les époux s’installent à Munster où naquirent en 1891 leur fille prénommée Marie et en 1893 leur fils Gustave .

​Le docteur Hecker jouit d’une bonne réputation et se consacre sans compter à sa nombreuse patientèle. Sa jeune femme a peu de contacts sociaux, se sent délaissée et s’ennuie à Munster.
Touché par le mal-être de son épouse il accepte de s’installer à Barr avec sa famille et de délaisser sa vocation de médecin pour intégrer la tannerie de son beau-père, ce bien qu’il ne connaisse rien de ce métier.
Sa conversion dans l'industrie
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Au tout début, il s’occupe de l’achat et de la réception des peaux et en 1893 il part se former à l’école de tannerie de Freiberg en Saxe. Puis avec ses deux beaux-frères, Jules et Jean Degermann, il entreprend les travaux d’extension et de modernisation de l’usine de la rue du Collège.
L’installation d’un laboratoire lui permet notamment d’effectuer des travaux de recherche sur un procédé nouveau de tannage des peaux aux sels de chrome.
Jusqu’à présent, les peaux étaient tannées à l’écorce de chêne ou de châtaigner, mais cette méthode nécessitait plusieurs mois de macération des peaux dans les cuves. Le nouveau procédé devait permettre de réduire considérablement ces délais et par voie de conséquence, d’augmenter le nombre des peaux traitées.
Parallèlement, il décide avec ses beaux-frères, de fonder une fabrique de gélatine à l’Elsau à Strasbourg mais celle-ci ne devait jamais atteindre le rendement escompté et au contraire, ses pertes devaient obérer les bons résultats de la tannerie qui progressivement arrivait à se relever de la crise du tannage qui sévissait à cette époque.
Son beau-père, Gustave Degermann qui s’était retiré des affaires en 1894 devait décéder en 1895.
Après une dizaine d’années d’exploitation avec des hauts et des bas, le Dr Hecker décide d’arrêter de financer les pertes de l’usine de gélatine ce à quoi son beau-frère lui oppose qu’il devait dans ce cas renoncer à la tannerie.
Il se retire de ces deux affaires et envisage un temps de s’installer comme médecin à Barr.
Le vignoble et le vin
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Le Dr Hecker avait conservé quelques vignes qu’il avait reçues en héritage à Munster. Les Degermann étaient d’autre part les plus grands propriétaires viticoles de Barr.
Il se consacre à la promotion des vins de qualité et lutte contre les pratiques douteuses voire scandaleuses des viticulteurs allemands qui coupent leurs vins à l’eau sucrée. D’autre part les maladies provoquées par les parasites et le phylloxera avaient atteint le vignoble de Barr et il décide de s’attaquer à ces fléaux. Il fonde l’association de viticulteurs de Barr et organise la première foire aux vins qui eut lieu en 1906.
Grâce à sa persévérance et à son action, une nouvelle loi viticole fut votée pour lutter contre les fraudes. De même, avec ses collègues viticulteurs barrois et l’institut viticole de Colmar, il fait développer des greffes sur des pieds de vigne américains plus résistants et mieux adaptés à la nature du sol. Le vignoble fut ainsi reconstitué, produisant un vin abondant et surtout de meilleure qualité qui permit de développer la vente en bouteilles des vins d’Alsace.
L'archiviste et historien
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Le Dr Hecker avait aussi une appétence toute particulière pour l’histoire de l’Alsace pour laquelle il avait repris des études en 1906-1907 et qu’il devait manifester en donnant en 1907 une conférence publique sur « la misère du peuple d’Alsace au 15e siècle » à la grande salle de la mairie. Il entreprend ensuite le classement des archives municipales à l’issue duquel il a été nommé archiviste de la Ville de Barr et devait publier deux ouvrages qui font toujours référence à ce jour : « Die Stadt Barr » en 1911 et « Die Herrschaft Barr » en 1914.
En 1912, à la suite du décès du Maire Jacques Moerlen, le Dr Hecker est élu Maire de Barr et dans son discours inaugural, il dresse un tableau assez sombre de la situation économique de la Ville.
Maire de Barr de 1912 à 1920
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Au début de son mandat, il continue à œuvrer pour la promotion du vignoble alsacien mais bien vite, les signes avant-coureurs du premier conflit mondial devaient briser son élan. Le Dr Hecker se conduit de façon exemplaire dans son exercice de Maire, malgré toutes les embûches des autorités allemandes qui le conduiront jusqu’à l’exil, mais nous auront l’occasion de développer cette période dans un autre chapitre.
Le 15 novembre 1918, à leur retour d’exil à Würzburg, la population barroise réserve un accueil triomphal aux époux Hecker et dès le 18 novembre il est réélu Maire de Barr.
Il reprend ses fonctions du mieux qu’il peut, oeuvre pour la modernisation et le développement de la ville, est à nouveau élu Maire lors des élections municipales de 1919, mais très affecté et affaibli par les 41 mois d’exil qu’il avait subis, le Dr Hecker meurt subitement le 24 avril 1920. Son premier adjoint, Henri Baumhauer lui succède lors de la séance du conseil du 4 mai 1920.

La machine à vapeur de 1897 dans l'usine agrandie

La demeure du Dr Hecker après 1897

Le Dr Hecker, décoré de la Légion d'Honneur par le Gal Vandenberg en 1919
(photo : fond A-M Brickmann)
Sources :
Ville de Barr
Annuaire 1992 de la Société d'histoire et d'Archéologie de Dambach la Ville - Barr - Obernai
Jules BOSSERT (1864-1941)
Industriel producteur et distributeur d’électricité
par Christian SCHMITTHEISLER
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Histoire d'un Barrois expatrié en Franche-Comté
Jules Bossert
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Né le 13 mars 1864 à Barr est le fils cadet d’Eugène Gottfried Bossert, fabricant de chaussons et maire de Barr (nommé par le Gouvernement de 1871 à 1881) et de Marguerite Diemer de Waltenheim-sur-Zorn.
Le 4 octobre 1890, en mairie de Strasbourg, il épouse Marie Rufenacht (1867-1939) de Strasbourg et dont la famille est originaire de Thun, Canton de Bern en Suisse.
De leur union naîtront quatre enfants.
Jean Geoffroy né le 30/08/1891 à Barr, décédé le 11/05/1898 à Faverney
Jacques Edouard Bossert né le 21/06/1894 à Faverney, ingénieur électricien, décédé le 13/08/1948 à Saint-Vit
Jules René Bossert né le 13/09/1897 à Faverney, décédé le 19/08/1898 à Faverney
Marguerite Julie «Suzanne» née 20/06/1900 à Faverney, décédée le 15/10/1962 à Saint-Vit
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Faverney
Jules Bossert débute sa carrière dans l’usine familiale dirigée par son père avant d’entreprendre ses propres activités industrielles vers 1892 à Faverney (Haute-Saône) où il exploite la manufacture «Bossert Frères» spécialisée en bonneterie et articles fourrés laine dits «chaussons de Strasbourg».
Durant leur séjour en Haute-Saône, les époux optent pour la nationalité française. En 1898, ils ont la douleur de perdre deux de leurs fils Jean Geoffroy et Jules René en l’espace de trois mois.
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La manufacture Bossert Frères de Faverney
Saint-Vit
En 1905, Jules Bossert fait l’acquisition d’un moulin à blé datant de 1498, reconstruit vers 1868.
Avec le concours de son beau-frère Ernest Edouard Rufenacht, commerçant au Havre, il créé la société Bossert-Rufenacht et Cie et fait transformer le « Moulin du Pré » à Saint-Vit (Doubs) en centrale hydroélectrique.
Deux turbines de fabrication artisanale sont installées dans le moulin et une machine à vapeur Boulte de 80 ch Lanz (Mannheim, Allemagne) dans l'aile sud (ancienne huilerie) avec ses chaudières dans un bâtiment neuf distinct.
Une deuxième machine à vapeur Sulzer de 225 ch avec 2 chaudières Boulte-Larlodière et Cie (Aubervilliers, Seine-Saint-Denis) est mise en place en 1913 et un deuxième bâtiment construit à l'ouest, ainsi qu'une cheminée en brique, pour accueillir les chaudières et stocker le charbon.
Hormis la production et la distribution d’électricité, la firme Bossert imagina aussi un service de vente des différents appareils et machines nécessaires dans les exploitations agricoles auxquelles il fournissait aussi le courant de force nécessaire à les alimenter.
En 1909, les Bossert et leur fille «Suzanne», habitent au hameau des Paluds proche de la centrale. Ils emploient Marie Peter une cuisinière alsacienne et Marie Leroux, domestique.
Leur fils Jacques Edouard est mobilisé et incoporé dès le 1er septembre 1914 alors qu’il est étudiant à l’école Breguet rue Falguière à Paris, spécialisée dans l'enseignement de l'électricité.
Durant toute la Grande Guerre, il est successivement affecté comme soldat de 2e classe à différents régiments du génie avant d’être démobilisé en octobre 1919.
Il se marie le 24 novembre 1919 à Paris avec Georgette Emilie (Mimi) Koenig dont il aura cinq fils et une fille.
Dès 1920, le couple s’installe au hameau des Paluds et Jacques exerce la profession d’ingénieur-électricien dans l’usine hydro-électrique de son père.
En 1928, la centrale équipée vers 1920 d’une 3e turbine (à chambre d'eau semi-pneumatique) placée dans l'aile nord et modifiée par Citroën (engrenages), est achetée par la Cie l'Energie industrielle qui sera ensuite intégrée à la société des Forces motrices de la Loue, devenue société des Forces motrices de l'Est puis nationalisée en 1946.
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Arbois
En 1914, la ville d’Arbois cherche à résoudre le problème de l’éclairage public. Le projet est confié à Jules Bossert, directeur de la compagnie électrique de Franche-Comté (CEFC) qui choisit l’électricité hydraulique, avec construction d’un barrage et d’une centrale.
Celle-ci sera construite à l’emplacement du moulin des Terreaux, au pied de l’église Saint-Just.
Il fallait aussi aménager le bassin de retenue et augmenter la puissance de la chute. Pour cela, la CEFC rachète les droits d’exploitation d’eau du lapidaire Joseph Collomb et du moulin Graby.
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Une conduite forcée d’une longueur de 120 m et de deux mètres de diamètre est installée sur la rive gauche de la Cuisance, passant sous le pont Saint-Just. Elle sert à alimenter en eau, les 3 turbines de la centrale hydroélectrique. La chute d’eau cumulée obtenue est de 11 mètres, avec un débit moyen annuel de 3 m³ /seconde. Freinés par la guerre de 1914-1918, ces travaux seront terminés vers 1920.
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La ville réglait en premier le problème de l’éclairage public qui était gratuit pour elle, la société Bossert se rattrapant sur les particuliers. L’usine est rachetée par Électricité de France, lors de la nationalisation en 1946.
Audelange
Parmi ses autres réalisation, la Compagnie Electrique de Franche Comté, dirigée par Jules Bossert, loue en 1928 le droit d’eau d’une ancienne scierie et d’une minoterie à Audelange (39) pour construire une centrale en échange de la fourniture de courant gratuite pour le moulin. Nationalisée en 1946 elle est abandonnée par EDF vers 1973.
Le choc pétrolier de 1973 et 1974, puis la hausse du coût de l’électricité, a incité les propriétaires du moulin à réactiver les trois turbines pour les besoins de la minoterie adjacente. En 2008, est venu le temps de la rénovation, afin de produire davantage d’électricité verte, désormais revendue à EDF.
La centrale produit l’équivalent de la consommation annuelle de 1 400 foyers, sans le chauffage.
Jules Bossert s’était entouré de collaborateurs compétents et dévoués qui lui ont permis de bâtir un important réseau de distribution électrique qui comprenait les centrales de Saint-Vit, du moulin d’Aranthon (entre Routelle et Osselle), de Mathenay, d’Avilley et de Brussey.
Lorsqu’il céda la Compagnie Electrique de Franche-Comté en 1928, son réseau couvrait 320 communes et employait 200 salariés.
Jules Bossert, bien connu des anciens Saint-Vitois a profondément marqué ce territoire de Franche-Comté de son empreinte.
Devenu veuf en 1939, il s’est éteint le 27 mai 1941 à Saint-Vit après une vie bien remplie.
(Sources : Etat civil – Recensements de 1909 et 1920 - Patrimoine architectural (Mérimée) – journal Le Progrès)
Jules Bossert né le 13 mars 1864 Barr– décédé le 27 mai 1941 à Saint-Vit



Adolphe Willm (1868-1939)
Restaurateur et viticulteur
Adolphe Willm est un personnage bien connu des Barrois.
Il est né le 19 avril 1868 à Barr, fils de David Willm ferblantier et Louise Caroline Sexauer.
En 1895, il épouse Lina Kaetzel et s’établit en 1896 rue Taufflieb en qualité de restaurateur et viticulteur à l’enseigne du Bouc Noir (« Zum schwarzen Bock »).
En fin gourmet, il remet au goût du jour une vieille recette « à l’alsacienne » préparée à partir du pied de l’escargot cuit dans un bouillon d’épices et de vin blanc, agrémenté d’un beurre relevé avec de l'ail, du persil et d'une petite touche de bouillon aromatisé qui apporte à l'escargot cette saveur si appréciée des connaisseurs.
Ce plat riche en saveurs qui se marie idéalement avec un bon verre de Riesling est la première signature de la maison Willm qui en acquiert rapidement une grande renommée tout en contribuant grandement à la réputation gastronomique de notre cité.
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par Christian SCHMITTHEISLER

Après la Grande Guerre, passionné par son 2e métier de viticulteur, il cède le Bouc Noir à Edouard Flugel et développe son domaine viticole dont une partie se situe au pied du Kirchberg à l’endroit même où les sources qui alimentent le Gaensbrœnnel sont captées.
Adolphe Willm exploite ce terroir de sols à dominante argilo-calcaire qui bénéficie d’un micro-climat sec et ensoleillé exceptionnel offrant fraîcheur et délicatesse aux vins.
Conscient du potentiel unique de cette terre, Adolphe Willm développe un art de la viticulture authentique et choisit avec son fils Émile de s’y consacrer pleinement.
Le Clos Gaensbrœnnel, terroir délimité par un muret de pierres centenaires au sein du Grand Cru Kirchberg de Barr devient la seconde signature du Domaine Willm, du Gewurztraminer d’exception qui porte son nom et dont la réputation franchit rapidement les frontières continentales.
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Grâce à sa recette d'escargots cuisinés à l'alsacienne, le Bouc Noir devient un haut lieu de la gastronomie barroise.

Publicité de la maison Willm parue dans le catalogue de l'Exposition Artisanale de 1926
C’est donc tout naturellement qu’Emile Willm qui prit la succession du domaine, voyant les dommages causés à notre chère fontaine par les combats de la libération de novembre 1944, prit l’heureuse initiative de faire restaurer le Gaensbrœnnel à ses frais.
Il est probable que sans son intervention désintéressée la fontaine aurait disparu comme ce fut le cas de celle de la Maison Rouge.

En 1959, Emile Willm est élu Grand Maître de la Confrérie Saint-Etienne, une institution dont les origines remontent au 14e siècle et dont les traditions ont été renouvelées en 1947.
Œuvrant pour la promotion des vins de qualité, la confrérie crée en 1957 son label de qualité, le Sigille des vins d’Alsace, sanctionnant une sélection stricte sur le double critère de la qualité et de la typicité.